29/10/2013
"Faire la paix avec la mort"
On devrait toujours vivre comme si on allait mourir le lendemain. On devrait toujours vivre là où l'on aimerait mourir. Le refoulement de la mort fait faire à l'homme bien des choses sans importance. Et seules les situations où il voit la mort de près paraissent révéler ce qui au fond le fait vivre. Dans ces instants, paraît-il, la personne en danger de mort voit sa vie défiler devant ses yeux, et tous les témoignages concordent.
En quelques secondes, ces flashs dévoilent l'intime. Rien de la vie professionnelle, publique, uniquement la vie privée. Ce qui passe en accéléré dans la tête de l'être humain sur le point de mourir, c'est tout ce qui le rattache à la vie : des gens et des endroits qu'il aime, des moments de bonheur à manger et à boire, à rire et à chanter, à rêver et à créer, à converser et à contempler, à lire et à faire ou écouter de la musique...
Ces bribes de vie qui reviennent en mémoire quand on frôle la mort, voilà le plus important. Tout le reste est secondaire. Pourtant c'est tout le reste qui occupe une bonne partie de la vie. Quelle est donc cette folie qui fait perdre de vue ce qui fait les joies de la vie ?! Comment un être dit vivant peut en arriver à ne plus donner signe de "vie", à ne plus avoir de réflexe de survie, à négliger son premier devoir : se maintenir en vie ?
Comment même "le seul animal qui se sait mortel et qui se veut immortel" peut préférer la mort, vouloir mourir ? Comment le désir d'échapper à la mort peut se muer en désir de se donner la mort ? Comment les pulsions de vie peuvent être submergées par les pulsions de mort ? La réponse est peut-être dans cette finitude qui peut conduire à juger que la vie est absurde et insignifiante, et ne vaut pas la peine d'être vécue.
Comment alors faire revenir à la vie un monde suicidaire qui nie la nature de l'homme en le précipitant dans le vide d'une existence sans but, et attente à sa et à la vie par mille poisons ? «Un monde occupé moins de vivre que de se hâter vers la mort» selon Georges Duhamel, oublieux de ce qui fait le sel de la vie et courant à l'échec. Comment ? En l'incitant peut-être à «faire la paix avec la mort» suggère Alain Finkielkraut.
«Chaque instant de la vie est un pas vers la mort» écrivait Corneille. Gardons cela en tête et regardons la mort en face pour choisir ce qui dans la vie vaut la peine d'être vécu et pour pouvoir se dire à la fin qu'on a vécu, qu'on a eu "une vie pleine, riche d'expérience et d'enseignements" qui peut avec un peu de chance nous amener à mourir en paix, malgré tout. «Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés» disait Péguy.
10:09 Publié dans Mort | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vivre, mourir, refoulement de la mort, choses sans importance, voir la mort de près, ce qui fait vivre l'homme, ce qui rattache l'homme à la vie, les joies de la vie, donner signe de vie, réflexe de survie, se maintenir en vie, préférer la mort, vouloir mourir, désir de se donner la mort, pulsions de vie, pulsions de mort, finitude, vie absurde et insignifiante, vie qui ne vaut pas la peine d'être vécue, revenir à la vie, monde suicidaire, nature de l'homme, le vide d'une existence sans but, poisons, georges duhamel, le sel de la vie, courir à l'échec, alain finkielkraut, corneille, regarder la mort en face, choisir ce qui vaut la peine d'être vécu, une vie pleine, expérience, enseignements, mourir en paix, péguy | Facebook |
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