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14/02/2018

Irresponsable et coupable

Depuis le désormais célèbre «responsable mais pas coupable», on s'interroge sur la notion de responsabilité. Beaucoup avancent qu'elle est une contrepartie de la liberté. La responsabilité peut donc être vécue comme une dépendance, une contrainte, et la liberté s'en trouve restreinte au droit de faire tout ce qui n'est pas défendu par la loi.

Seulement, qui connaît cette loi que nul n'est censé ignorer ? Les dirigeants s'entourent de toutes les précautions pour éviter de subir les conséquences de leurs décisions. Et c'est la définition même de responsabilité qui est mise en cause. «D'obligation ou de nécessité morale, intellectuelle de réparer une faute, de remplir un devoir, un engagement», la responsabilité devient un risque à écarter.

Il ne s'agit donc plus d'assumer mais de se couvrir. D'accord pour prendre une responsabilité mais à condition de ne pas avoir à endosser la responsabilité, de ne pas être tenu pour responsable, au cas où... C'est ainsi que la responsabilité se fait de plus en plus collective et se dilue dans toute une chaîne de responsabilités. C'est ainsi que l'assurance envahit toute la société.

Ce dernier phénomène est tout à fait symptomatique d'une "déresponsabilisation" individuelle. Le responsable, en fait bien souvent dépassé par sa charge du fait d'une complexité croissante dans tous les domaines, préfère se décharger, se libérer, décliner toute responsabilité. Et l'excès de prudence, l'obsession de se prémunir favorisent l'immobilisme.

Mais rendre compte et répondre de ses actes - cette si insupportable transparence - n'est pas forcément non plus dans les habitudes des responsables, plus enclins à demander des comptes qu'à en devoir. Et le réflexe serait plutôt de rejeter la responsabilité sur les autres, de rendre quelqu'un d'autre responsable, plutôt que d'en être solidaire.

Etre responsable c'est être conscient d'être l'auteur incontestable d'un événement ou d'un objet, écrivait en substance Sartre. Etre responsable consisterait donc à reconnaître s'il y a lieu sa culpabilité. Aveu d'autant plus difficile à faire que l'on a agi de façon déraisonnable, irréfléchie ou inconséquente, c'est-à-dire de façon irresponsable. Irresponsable et coupable.

22/04/2014

L'homme : un grand gosse qui n'a rien d'un enfant

«L'enfance est terriblement sérieuse, ne l'oubliez pas. Un enfant engage tout son être. Et nous, hommes graves et mûrs ? A quoi sommes-nous prêts à engager tout notre être ? Nous tenons trop à notre chère carcasse.» Vercors pointait ainsi un de nos travers dans une société où une fois installé, il y a plus à perdre qu'à gagner. "Parvenu à une situation qui assure l'aisance et le confort", qui serait prêt à tout remettre en jeu ?

Serions-nous devenus une société de parvenus, de nouveaux riches et de "gosses de riches", de "fils et filles à papa" sans goût, qui étalent leurs richesses avec ostentation à la face du quart-monde et du tiers-monde, et tirent avantage de leur position sans penser à après eux ? Et nous serions-nous embourgeoisés, roulant les mécaniques mais en fait ronronnant roulés sur nous-mêmes et n'ayant plus grand-chose dans le ventre ?

Et peut-on encore parler de civilisation si plus rien n'est construit pour durer, si l'on se moque de tout ce qui pourrait advenir après notre mort ? Tout serait-il dorénavant voué au temps, à l'usage, à la destruction, y compris les œuvres de l'homme ? Tout deviendrait-il produit de consommation ? Et les hommes actuels seraient-ils en réalité des petits capricieux, réclamant à cor et à cri de nouveaux "jouets" pour les casser aussitôt ?

Oui, «Beaucoup d'hommes n'engagent jamais leur être» écrivait aussi Georges Bernanos, c'est-à-dire refusent de se "mettre dans une situation qui crée des responsabilités et implique certains choix". Menant une vie sans engagement, ils ne savent pas ce qu'ils veulent et changent d'opinion à tout moment. Caractères sans consistance, ils ambitionnent de faire de grandes choses mais ne s'en donnent pas les moyens.

De tels individus "sans fermeté, irrésolus", irréfléchis et changeants, incapables de faire des choix et de s'y tenir, de prendre leurs responsabilités, de s'exposer, de s'assumer et d'assumer, doivent toutefois donner le change à ceux qui les entourent. Ils se composent un personnage dont les attitudes et les expressions masquent leurs abdications. Et ils font du sentiment là où seules la raison et l'action devraient avoir leur place.

Ces "gamins" impulsifs agissent "selon leur fantaisie", "par humeur et non par raison, par volonté". Coups de tête, foucades, tocades sont leur quotidien. Pleins de bonnes résolutions sans lendemain, de promesses en l'air, d'engagements non respectés, d'obligations non remplies. Trop gâtés et "sur la défensive", ils ne se donnent pas entièrement, mesurent leur peine, leurs efforts, ils comptent quand un enfant lui ne compte pas.