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13/06/2019

Les lendemains qui déchantent

Nous vivons nos nuits les plus courtes de l'année. Certains les fêtent même en chantant. Pourtant il s'agit tout au plus et approximativement de la coïncidence de nos heures de sommeil avec celles de l'obscurité. Huit heures de nuit, huit heures de repos, et voilà tout. Pas de quoi fouetter un astronome qui s'échine à nous affirmer qu'il y a toujours des saisons, quoi qu'on dise.

Dans son entêtement à vouloir tout expliquer, celui-ci parle de «l'inclinaison de l'axe de rotation de la Terre (23° 26') par rapport à la perpendiculaire à son plan de translation autour du soleil». Au solstice de juin, le pôle nord a un penchant pour l'astre du jour, et nous entraîne avec lui. D'où, dans le mouvement giratoire de 24 heures, la nuit la plus courte. Et le début de l'été dans l'hémisphère nord.

En un an, notre planète décrit ainsi une orbite elliptique autour de son étoile, chauffante et éclairante. Un peu plus près ou un peu plus loin, la Terre était invivable, trop chaude ou trop froide. Elle ne doit la vie qu'à un incroyable concours de circonstances. Et nous pays développés devons sans doute une bonne partie de notre vitalité à notre situation géographique et notre climat tempéré, ni très chaud, ni très froid.

Ni banquises, ni déserts. Ni moussons, ni sécheresses... Rien de tous ces cataclysmes qui ruinent des années d'efforts, de ces fléaux qui déciment des populations entières, de ces conditions de vie insupportables qui font baisser les bras des plus courageux. Confortablement installés sur notre lopin de Terre abrité, nous profitons des aménagements réalisés pour beaucoup dans le passé.

Mais la Terre tourne et le temps aussi, la chance peut-être également. Le climat nous réserve des surprises depuis quelques années. Des températures aux précipitations en passant par l'ensoleillement, le vent..., tout semble déréglé. «Il n'y a plus de saisons». La faute, disent des spécialistes, à l'Homme, trop souvent oublieux du passé, insouciant du lendemain, de l'avenir, du danger.

Dans un univers qui voit la course des astres se poursuivre imperturbablement depuis la nuit des temps, l'Homme sème la perturbation sur cette Terre qui tourne sur elle-même et gravite autour du soleil. Tourné sur lui-même, gravitant autour d'un pouvoir trompeur, l'Homme poursuit sa course folle, sûr d'avoir l'éternité devant lui. La course du temps se poursuit pourtant. Et les nuits les plus courtes, frivoles et gaies, sont suivies souvent de lendemains qui ne chantent pas.

02/12/2014

Retour à l'envoyeur

L'homme industrieux, l'homme ingénieux, habile et inventif, est à l'origine de la formidable évolution de l'humanité. Mais cet homme est aujourd'hui confronté dans beaucoup de domaines à un phénomène de retour de manivelle, de bâton ou de flamme. Bien de ses inventions lui deviennent contraires, et la nature elle-même. Et ce choc en retour ou contre-choc est tel que nombreux sont les humains comme frappés de stupeur.

Etre 100 % naturel, l'homme a cru pouvoir s'affranchir des lois de la nature. Mais se couper de la nature, c'est s'amputer. S'en prendre à la nature, c'est s'en prendre à soi-même. Vouloir sortir de la nature, c'est comme vouloir sortir de soi. La science et la technique ont ainsi voulu domestiquer la nature, la rendre moins inhospitalière, la maîtriser pour l'utiliser, et elles y ont réussi pour partie, mais la nature est rebelle et développe des résistances.

Les revirements soudains, les réactions imprévues en sens opposé, les contrecoups de l'action agressive de l'homme sur la nature, les conséquences néfastes ou dangereuses que nous sommes en train de vivre, sont autant de signaux d'alerte. La nature reprend sa place, et la question de la place de l'homme dans la nature se pose. «La nature agit toujours avec lenteur» pensait Montesquieu, en temps normal sans doute, et encore.

Georges Duhamel lui, disait que «La nature ne procède que par bonds et désordres soudains». Quoi qu'il en soit, «La nature bienfaisante, qui toujours travaille à rétablir ce que l'homme ne cesse de détruire» selon Buffon, pourrait bien emporter l'homme dans son mouvement de restauration des grands équilibres. La nature n'est ni bonne ni méchante, elle obéit à des lois et l'homme va peut-être payer cher son sentiment de supériorité.

II le paye déjà cher par de multiples affections dues aux altérations qu'il fait subir à son milieu. Mais aux victimes, on ose leur dire que "c'est la faute à pas de chance" ou alors à leur "Terrain favorable" qui serait comme une provocation pour les "Facteurs déclenchant". La génétique, espère-t-on, remédiera un jour au "Terrain". Quant aux "Facteurs", s'y attaquer vraiment serait remettre en question une partie de notre mode de vie.

Et «notre mode de vie n'est pas négociable», comme disait Georges Bush père. Alors on procède par étapes pour ne pas toucher à la sacro-sainte croissance et au progrès à grands pas. Seulement la politique des petits pas suffira-t-elle à retourner la situation, à renverser la tendance, à trouver les parades ? L'acte d'hostilité de l'homme vis-à-vis de la nature dite hostile se retourne contre son auteur, c'est l'effet boomerang. Boum !

21/10/2014

Un temps et une Terre à ménager

L'important, c'est de durer. On l'a trop oublié dans notre civilisation de l'éphémère, du fugitif, du provisoire, du passager, du périssable, du temporaire, du transitoire... "Œuvrer durablement pour l'avenir" ne veut plus rien dire pour des hommes engagés dans la brève échéance. Le "court-termisme" a fait de nous des hommes à courte(s) vue(s). Nos projets, actions... sont souvent "faits sans souci de l'avenir". "Dieu y pourvoira", tu parles !

L’usure (l'intérêt de l'argent, d'un capital prêté et par extension le prêt à intérêt lui-même ; et l'altération, la détérioration par l'usage) fait tourner les boutiques. Durer, "résister au passage du temps, à l'usage, à la destruction", est donc un anachronisme pour l'époque. La consommation, moteur de la croissance, c'est l’"utilisation de biens et de services", l’"action de faire des choses un usage qui les détruit ou les rend ensuite inutilisables".

Cette logique conduit à la destruction de la planète. Les experts du Comité de veille écologique de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l'homme préconisaient fin 2006 «une logique de durabilité. Objectif : concevoir les produits industriels pour qu'ils durent, soient réparés ou recyclés afin de réduire les flux de matières, de déchets et d'énergie ; remplacer la vente d'un produit par sa location». C'est l'exact contre-pied de la consommation.

L'avenir de l'humanité est bouché à quelques décennies. Dix objectifs et cinq propositions composaient donc un Pacte écologique pour un développement durable. Avec en filigrane une réflexion sur la notion de temps, de durée. Au delà de la confusion vitesse et précipitation, si nous avions pris le temps hier (notamment de la réflexion), nous aurions évité d'être pris par le temps aujourd'hui. «Demain, il sera trop tard» avertissait Nicolas Hulot.

Réalisé la même année, le documentaire de Jean-Michel Carré J'ai (très) mal au travail examinait ce rapport au temps, au travail. Une autre urgence y est à l'œuvre : «l'instantanéité». «En cause, le contexte économique, mais aussi la révolution technologique, ordinateurs, internet, téléphones portables, "qui entraînent une tension du temps encore accrue", constate» Nicole Aubert, spécialiste des aspects humains du management.

Une maxime latine met en garde : «Festina lente», hâte-toi lentement. Mais au lieu d’"aller lentement pour arriver plus vite à un travail bien fait", l'homme a salopé le travail en voulant aller trop vite et doit maintenant le reprendre. Un proverbe italien dit : «Chi va piano, va sano», qui va doucement, va sûrement, et «Chi va sano, va lontano», qui va sûrement, va loin. S'il «veut voyager loin», que l'homme «ménage sa monture» (Racine) !