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05/12/2014

Oppression et répression

Selon Nietzsche : «Le pire ennemi de la vérité ce n'est pas le mensonge mais les convictions». Ces "opinions assurées" qui sont le contraire du doute, du scepticisme, empêchent la recherche de la vérité qui devrait être la seule ambition de toute démarche intellectuelle. Mais bien souvent, on ne cherche qu'à avoir le dernier mot quand on ne refuse pas toute discussion, tout débat par une réaction de rejet de tout propos dérangeant.

Ecarter tout contradicteur, l'emporter, voilà la satisfaction des idéologues et des sectaires adeptes de la chasse aux sorcières, tout heureux de débusquer du politiquement incorrect. Ces nouveaux inquisiteurs drapés dans leur vertu poursuivent de leur vindicte les "mal-pensants" et allument des bûchers pour brûler ces hérétiques et leurs écrits interdits, leurs sujets tabous. Tout en s'affirmant curieux, ouverts et tolérants.

Ces maîtres censeurs manient le flicage, le rappel à l'ordre et le bannissement, persuadés d'extirper le mal. Nostalgiques peut-être des bonnes vieilles méthodes staliniennes et de la police de la pensée, ces donneurs de leçons n'accordent la liberté d'expression qu'à ceux du même avis, accusent sans donner jamais la parole à la défense, montent des cabales et prononcent des condamnations à mort sans appel.

Ils instaurent ainsi un caporalisme intellectuel qui exclut toute pensée déviante avec son penseur, en le traitant comme un paria (mise à l'écart, à l'isolement, à l'index, lynchage médiatique...). Ces exécuteurs des basses œuvres adorent couper les têtes, celles qui dépassent et qui les dépassent. Ils ont une guillotine dans la tête et beaucoup d'idées préconçues, "élaborées sans jugement critique ni expérience" et de détestations rancies.

Juges et parties, juges et assassins, ils ont toujours raison. Ils se posent même en victimes, blessées dans leurs convictions. Ce sont des chevaliers sans reproche, redresseurs de torts, voulant purger la société de ses indésirables. L'épuration éthique (au nom de la morale) a ceci de bien : elle donne bonne conscience. Et ce "progressisme moralisateur" irait de pair avec le "réalisme économique", tous deux oppressifs et répressifs.

Enfin, si l'on en croit un certain Karl Marx, cité par Valeurs Actuelles, qui écrivait il y a plus d'un siècle : «II n'y a pas lieu de s'étonner si cette gauche moderne, ou libérale-libertaire, qui contrôle désormais à elle seule l'industrie de la bonne conscience, constitue d'ores et déjà la forme idéologique la plus appropriée pour préparer, accompagner et célébrer les terribles développements à venir de l'économie se déployant pour elle-même».

09/11/2012

Ordre ou désordre, moral ou amoral ?

On a peine à croire qu'en 2002 à la même époque l'on était, à entendre certains dans les médias, en train de vivre un «retour à l’ordre moral». Mais au fait, qu'est-ce que «l’ordre moral» ? Voilà en effet une formule qui fait trembler sans réelle raison. Mêlant leurs propres fantasmes à des idéologies à peine voilées, des libertaires y allaient de leur refrain, sûrs qu'il serait repris par les "bien-pensants", toujours prompts à hurler avec les loups contre toute mesure «liberticide».

L'expression «Ordre moral» date en fait de son instauration en 1873 au début de la Troisième République, par le maréchal de Mac-Mahon et le duc de Broglie. Cette politique «conservatrice, antirépublicaine et cléricale» se caractérisait par «l'épuration de l'administration et le renvoi de maires républicains». Sans oublier les pèlerinages officiels des députés conservateurs (cf. Histoire de France, au Seuil).

Pierre Miquel dans son Histoire de la France, de Vercingétorix à Charles de Gaulle chez Marabout, précise qu'«Il s'agissait de rétablir Dieu dans l'Etat, dans la cité, dans la famille (...). Les enterrements civils étaient interdits de jour. Les débits de boisson, ces antres du radicalisme rural, étaient soumis à une stricte surveillance. Les journaux républicains (...) étaient interdits à la criée».

«Les assomptionnistes et les autres ordres religieux (...) multipliaient les processions, plantaient solennellement des croix dans les villages (...).» Etc. Finalement, la restauration échouera, la République triomphera et le socialisme progressera avec les suites que l'on sait. Reconnaissons que l'on est loin de la situation de 1873 et qu'aujourd'hui, l'on en serait plutôt à déboulonner les croix.

Le «retour à l’ordre moral» n'est donc pas pour demain. L'on vit au contraire une époque d'inversion des valeurs, où ce qui était beau, bien, vrai... ne l'est plus pour une part. Les "bons principes" et Dieu n'y ont plus leur place. La morale et l'ordre y sont relatifs, la permissivité quasi absolue. La société de consommation approuvant cette amoralité bien arrangeante puisqu'autorisant tous les commerces.

La conclusion (ironique) revient au magazine Marianne. «Ordre moral : système oppressif qui caractérise une société où les films porno sont diffusés à la télévision, où les sex-shops sont plus nombreux que les librairies, où les récits d'orgasmes se transforment mécaniquement en succès littéraire, où les amours dans une piscine sont programmées en prime time et où Bouvard anime "Les grosses têtes".»