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17/10/2019

La morale de l'Histoire

«En négligeant la formation du sens historique, en oubliant que l'Histoire est la Mémoire des peuples, l'enseignement forme des amnésiques. On reproche parfois de nos jours aux écoles, aux universités, de former des irresponsables, en privilégiant l'intellect au détriment de la sensibilité et du caractère. Mais il est grave aussi de faire des amnésiques», concluait Régine Pernoud dans son livre Pour en finir avec le Moyen Âge, au Seuil.

Et l'historienne décédée en 1998, poursuivait : «Pas plus que l'irresponsable, l'amnésique n'est une personne à part entière ; ni l'un ni l'autre ne jouissent de ce plein exercice de leurs facultés qui seul permet à l'homme, sans danger pour lui-même et pour ses semblables, une vraie liberté.» Régine Pernoud aurait-elle écrit cela en vain en 1977, alors qu'elle poursuivait son œuvre de réhabilitation du Moyen Âge ?

Ses «Simples propos sur l'enseignement de l'Histoire» gardent en tout cas leur force. Nourris qu'ils sont par la conviction de l'importance des «sciences humaines dans la formation de l'élève». «L'enfant lui-même et les impératifs de son développement» doivent être, selon elle, à la base de l'élaboration des programmes. Ceux-ci ne devant pas seulement prévoir «l'étude des faits» mais aussi «la formation du sens historique».

Peut-être pour éviter «l'histoire officielle et menteuse» dénoncée par Balzac, Régine Pernoud exclut «de s'en tenir à l'histoire politique et militaire». De plus affirme-t-elle, «l'Histoire ne se comprend qu'en liaison avec géologie et géographie, étendue à l'économie, à l'histoire de l'art, etc.». En fait, «l'Histoire, c'est la vie». Une vie qui s'inscrit dans une continuité, une succession : «Parce que tout ce qui est vie est donné, transmis».

Rien donc ne lui apparaît plus absurde que l'expression «faire table rase» du passé. Absurde et dangereuse car conduisant inévitablement à la mort et à la destruction - l'Histoire justement nous l'enseigne. «On ne part jamais de zéro.» Alors qu'en s'appuyant sur la tradition, il est possible de poursuivre, de construire. Voilà pourquoi «la recherche du vécu, ce vécu à partir duquel nous menons notre propre vie», est essentielle.

Mais la recherche historique, l'étude de l'Histoire sont aussi des écoles de patience, d'exigence, de «respect» qui s'opposent aux opinions préconçues, au simplisme. «Pas de connaissance véritable sans recours à l'Histoire.» «L'étude de l'Histoire apporte à la jeunesse l'expérience qui lui manque» dit Régine Pernoud, et lui évite le fanatisme et l'infantilisme. Pour accéder à cette «vraie liberté». Pour autant qu'on le veuille.