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09/12/2014

Une France à aimer

«Dostoïevsky soulignait que "toute société, pour se maintenir et vivre, a besoin absolument de respecter quelqu'un et quelque chose, et surtout que ce soit le fait de tout le monde, et non pas de chacun selon sa fantaisie" Cette citation tirée du livre Nouveau monde Vieille France aux éditions Perrin, permettait à son auteur Nicolas Baverez de dénoncer comme suicidaire le désintérêt de beaucoup pour le «destin collectif de la nation».

Une nation est un "groupe humain, généralement assez vaste, qui se caractérise par la conscience de son unité (historique, sociale, culturelle) et la volonté de vivre en commun". On peut lui préférer le nom de patrie, étymologiquement le pays du père, qu'on évoque en employant l'expression "La mère patrie" qui lui donne une dimension encore plus affective. «Je suis de mon enfance comme d'un pays» écrivait Saint-Exupéry.

Le patriote "qui aime sa patrie et la sert avec dévouement", ne se réveille pas seulement en chacun de nous lors par exemple d'une finale de Coupe du monde de football. Il peut être là aussi à des moments où on l'attend le moins. Ainsi racontait Erik Orsenna il y a quelques années au magazine Valeurs actuelles, «nous avons demandé à un échantillon représentatif de Français : "A quel moment, (...) vous êtes-vous sentis pour la dernière fois français ?"

«60 % ont répondu : "Lors de l'éclipse de soleil". Nous leur avons demandé pourquoi. Réponse : "Parce que nous étions dehors, ensemble, à regarder dans la même direction" Toute l'idée de nation ou de patrie est dans ce "Regarder ensemble dans la même direction" cher à Saint-Exupéry, qui disait que c'était cela aimer. Et c'est peut-être cela le "mal français" : un manque d'amour et même comme une honte. Pourtant…

Ses paysages, ses monuments, sa langue, sa culture, ses traditions... font de notre pays, le pays où il fait bon vivre, et celui le plus visité au monde. Son histoire et ses valeurs témoignent aussi d'«un idéal de résistance», comme le notait François Bayrou dans Projet d’espoir chez Plon, qui n'empêche pas la France d'être à la pointe aujourd’hui dans bien des domaines. Autant de motifs de fierté n'interdisant en rien la lucidité.

La philosophe Simone Weil* écrivait : «Un amour parfaitement pur de la patrie a une affinité avec les sentiments qu'inspirent à un homme des jeunes enfants, ses vieux parents, une femme aimée... Un tel amour peut avoir les yeux ouverts sur les injustices, les crimes, les hontes contenus dans le passé, le présent et les appétits du pays, sans dissimulation ni réticence, et sans être diminué, il en est seulement rendu plus douloureux».

* citée par Max Gallo dans Fier d’être français aux éditions Fayard

05/12/2014

Oppression et répression

Selon Nietzsche : «Le pire ennemi de la vérité ce n'est pas le mensonge mais les convictions». Ces "opinions assurées" qui sont le contraire du doute, du scepticisme, empêchent la recherche de la vérité qui devrait être la seule ambition de toute démarche intellectuelle. Mais bien souvent, on ne cherche qu'à avoir le dernier mot quand on ne refuse pas toute discussion, tout débat par une réaction de rejet de tout propos dérangeant.

Ecarter tout contradicteur, l'emporter, voilà la satisfaction des idéologues et des sectaires adeptes de la chasse aux sorcières, tout heureux de débusquer du politiquement incorrect. Ces nouveaux inquisiteurs drapés dans leur vertu poursuivent de leur vindicte les "mal-pensants" et allument des bûchers pour brûler ces hérétiques et leurs écrits interdits, leurs sujets tabous. Tout en s'affirmant curieux, ouverts et tolérants.

Ces maîtres censeurs manient le flicage, le rappel à l'ordre et le bannissement, persuadés d'extirper le mal. Nostalgiques peut-être des bonnes vieilles méthodes staliniennes et de la police de la pensée, ces donneurs de leçons n'accordent la liberté d'expression qu'à ceux du même avis, accusent sans donner jamais la parole à la défense, montent des cabales et prononcent des condamnations à mort sans appel.

Ils instaurent ainsi un caporalisme intellectuel qui exclut toute pensée déviante avec son penseur, en le traitant comme un paria (mise à l'écart, à l'isolement, à l'index, lynchage médiatique...). Ces exécuteurs des basses œuvres adorent couper les têtes, celles qui dépassent et qui les dépassent. Ils ont une guillotine dans la tête et beaucoup d'idées préconçues, "élaborées sans jugement critique ni expérience" et de détestations rancies.

Juges et parties, juges et assassins, ils ont toujours raison. Ils se posent même en victimes, blessées dans leurs convictions. Ce sont des chevaliers sans reproche, redresseurs de torts, voulant purger la société de ses indésirables. L'épuration éthique (au nom de la morale) a ceci de bien : elle donne bonne conscience. Et ce "progressisme moralisateur" irait de pair avec le "réalisme économique", tous deux oppressifs et répressifs.

Enfin, si l'on en croit un certain Karl Marx, cité par Valeurs Actuelles, qui écrivait il y a plus d'un siècle : «II n'y a pas lieu de s'étonner si cette gauche moderne, ou libérale-libertaire, qui contrôle désormais à elle seule l'industrie de la bonne conscience, constitue d'ores et déjà la forme idéologique la plus appropriée pour préparer, accompagner et célébrer les terribles développements à venir de l'économie se déployant pour elle-même».

02/12/2014

Retour à l'envoyeur

L'homme industrieux, l'homme ingénieux, habile et inventif, est à l'origine de la formidable évolution de l'humanité. Mais cet homme est aujourd'hui confronté dans beaucoup de domaines à un phénomène de retour de manivelle, de bâton ou de flamme. Bien de ses inventions lui deviennent contraires, et la nature elle-même. Et ce choc en retour ou contre-choc est tel que nombreux sont les humains comme frappés de stupeur.

Etre 100 % naturel, l'homme a cru pouvoir s'affranchir des lois de la nature. Mais se couper de la nature, c'est s'amputer. S'en prendre à la nature, c'est s'en prendre à soi-même. Vouloir sortir de la nature, c'est comme vouloir sortir de soi. La science et la technique ont ainsi voulu domestiquer la nature, la rendre moins inhospitalière, la maîtriser pour l'utiliser, et elles y ont réussi pour partie, mais la nature est rebelle et développe des résistances.

Les revirements soudains, les réactions imprévues en sens opposé, les contrecoups de l'action agressive de l'homme sur la nature, les conséquences néfastes ou dangereuses que nous sommes en train de vivre, sont autant de signaux d'alerte. La nature reprend sa place, et la question de la place de l'homme dans la nature se pose. «La nature agit toujours avec lenteur» pensait Montesquieu, en temps normal sans doute, et encore.

Georges Duhamel lui, disait que «La nature ne procède que par bonds et désordres soudains». Quoi qu'il en soit, «La nature bienfaisante, qui toujours travaille à rétablir ce que l'homme ne cesse de détruire» selon Buffon, pourrait bien emporter l'homme dans son mouvement de restauration des grands équilibres. La nature n'est ni bonne ni méchante, elle obéit à des lois et l'homme va peut-être payer cher son sentiment de supériorité.

II le paye déjà cher par de multiples affections dues aux altérations qu'il fait subir à son milieu. Mais aux victimes, on ose leur dire que "c'est la faute à pas de chance" ou alors à leur "Terrain favorable" qui serait comme une provocation pour les "Facteurs déclenchant". La génétique, espère-t-on, remédiera un jour au "Terrain". Quant aux "Facteurs", s'y attaquer vraiment serait remettre en question une partie de notre mode de vie.

Et «notre mode de vie n'est pas négociable», comme disait Georges Bush père. Alors on procède par étapes pour ne pas toucher à la sacro-sainte croissance et au progrès à grands pas. Seulement la politique des petits pas suffira-t-elle à retourner la situation, à renverser la tendance, à trouver les parades ? L'acte d'hostilité de l'homme vis-à-vis de la nature dite hostile se retourne contre son auteur, c'est l'effet boomerang. Boum !