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30/06/2023

A quoi ça sert de vivre ? A servir

Vivre, à quoi ça sert ? telle est la question à laquelle répond Sœur Emmanuelle dans cet ouvrage paru en 2004 chez Flammarion. S'agit-il donc que toute vie serve à quelque chose ou à quelqu'un ? sa valeur étant liée à son utilité et "ce qui ne sert à rien" ne pouvant être digne d'estime. Ce serait "entrer dans le jeu" de ces préoccupations utilitaires - intéressées -, tout à la recherche d'avantages personnels et matériels, qui occupent tant de vies.

Non, il s'agit plutôt ici de s'interroger sur ce qui donne un sens à la vie de l'homme. «(...) Car enfin, remarque le penseur Blaise Pascal dans ses Pensées, qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout (...) également incapable de voir le néant d'où il est tiré, et l'infini où il est englouti (...) dans un désespoir éternel de connaître ni leur principe, ni leur fin.»

Désespoir d'autant plus grand que «Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie et tout le reste : on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais». D'où peut-être cette fièvre qui semble saisir l'homme dans sa continuelle quête du bonheur malheureusement pervertie par cette tentation d'avoir, de posséder, cette ambition du pouvoir, de dominer, cette prétention de savoir, de tout maîtriser.

Et ajoute Pascal : «Nous ne nous contentons pas de la vie que nous avons en nous et en notre propre être : nous voulons vivre dans l'idée des autres d'une vie imaginaire et nous nous efforçons pour cela de paraître. Nous travaillons incessamment à embellir et conserver notre être imaginaire et négligeons le véritable». Tel est l'homme, déchiré «entre la raison et les passions», «toujours divisé, et contraire à lui-même».

Tout affairé à satisfaire ses pulsions, ses désirs, ses besoins, l'homme reste pourtant sur sa faim. Le sens de la vie n'est pas là. «Or, dit Pascal, à quoi pense le monde ? (...) à danser, à jouer du luth, à chanter, (...) à se battre, à se faire roi, sans penser à ce que c'est qu'être roi, et qu'être homme.» Le bon sens serait d'arrêter le mouvement et ce "mouvement de soi à soi", et de choisir le mouvement vers l'autre, source de joie.

Travailler à avoir un esprit sain dans un corps sain. Ne pas oublier que «Tout nous peut être mortel, même les choses faites pour nous servir (...) si nous n'allons pas avec justesse». Pour tout, se demander : qu'est-ce que ceci, au regard de l'éternité ? Et puisque «La sagesse nous envoie à l'enfance», se libérer des vanités au profit du don et de l'abandon. La vie n'a de sens que quand elle prend "le sens du service et du partage".

16/12/2020

Le Noël des familles

Bientôt Noël. Cette fête chrétienne qui tire son origine de la naissance d'un enfant pas comme les autres, est avant tout une fête familiale qui réunit les générations autour d'un sapin, d'une crèche, d'un feu de cheminée, d'une table, de bougies, de chants... et de cadeaux.

Les plus beaux Noëls sont évidemment ceux de notre enfance, Chaque détail est inscrit à tout jamais dans notre mémoire. Tout commençait avec l'achat du sapin dont l'odeur de la sève éveillait en nous une envie de nous perdre en montagne dans une forêt d'épicéas et de nous coucher sur un lit d'aiguilles craquantes et dorées.

La décoration réalisée ensemble était déjà l'occasion d'une fête. Nous déballions précautionneusement les santons et les boules en chantant et en nous chamaillant. Chaque élément trouvait sa place dans un ordre immuable. Et les guirlandes montaient en longues volutes vers l'étoile au faîte de l'arbre vert.

L'attente commençait. Les allers et retours à l'école sous les illuminations des rues se faisaient en état d'ivresse légère. Et nous arrivions ainsi, entre rêve et réalité, à la veillée. La belle nappe, la belle vaisselle solennisaient l'instant et les bougies éclairaient les yeux et les visages d'une douce et changeante lumière dans la pénombre.

Le feu crépitait dans la cheminée et, fascinés, nous regardions les flammes danser. Les chants traditionnels s'élevaient et nous élevaient. On ouvrait le champagne. Et le menu, toujours le même, avait le goût du bonheur. Les chandelles et le temps coulaient trop vite. Il était déjà temps d'aller se coucher.

Après une nuit agitée, nous accourions vers le séjour. Dans l'étroit espace entre les montants de la porte entrebâillée et du bâti, nous apercevions nos parents aller et venir. Ils disposaient les paquets, déposaient le petit Jésus dans la crèche, allumaient les guirlandes. Nul n'était besoin de croire au père Noël pour ajouter au merveilleux.

Enfin, nous nous précipitions sur les jouets tant espérés. Nous recevions et nous donnions ce que nous avions réalisé nous-mêmes ou acheté avec attention. C'était la joie. Nous riions, nous nous embrassions. Et dans la fraîcheur du petit matin, en robe de chambre ou pyjama, tous encore fripés de la nuit passée, nous réalisions ce qu'est une famille et nous rendions grâce.

16/08/2020

Mélodies d'été, mélancolie d'hiver

«Des villas, des mimosas, Au fond de la baie de Somme, La famille sur les transats, Le pommier, les pommes. Je regardais la mer qui brille dans l'été parfait. Dans l'eau se baignaient des jeunes filles qui m'attiraient.» La chanson d'Alain Souchon exprime la nostalgie de l'enfance et des vacances en famille. On avance, tel est son titre ; évocateur de la fuite des jours et de nos fuites : "en avant" ou "devant nos responsabilités".

On est cette «Foule sentimentale» dont parle encore Alain Souchon : «On a soif d'idéal - Attirée par les étoiles, les voiles - Que des choses pas commerciales». Le temps des vacances est aussi celui de l'abandon - de la détente, de la nonchalance - et de l'abandon de notre vie bassement matérielle et de ses intérêts. Tout à la "satisfaction" de nos "aspirations du cœur ou de l'esprit", nous retrouvons pour un moment notre naturel.

Mais «Foule sentimentale - II faut voir comme on nous parle - Comme on nous parle» continue Alain Souchon. Car dès la rentrée, le matraquage reprendra. Nous serons à nouveau bombardés : «0h la la la vie en rose - Le rose qu'on nous propose - D'avoir les quantités d'choses - Qui donnent envie d'autre chose - Aïe, on nous fait croire - Que le bonheur c'est d'avoir - De l'avoir plein nos armoires - Dérisions de nous dérisoires (...)».

«Il se dégage - De ces cartons d'emballage - Des gens lavés, hors d'usage - Et tristes et sans aucun avantage - On nous inflige - Des désirs qui nous affligent - On nous prend faut pas déconner dès qu'on est né - Pour des cons alors qu'on est - Des - Foules sentimentales - Avec soif d'idéal (...)». Une soif de bien-être, un "désir passionné et impatient" - "ardent" - de nous accomplir, de nous épanouir, de nous réaliser pleinement.

«La France ne se réalise pleinement que dans l'harmonieux équilibre» écrivait André Gide. N'est-ce pas ce qui nous manque cruellement ? N'est-ce pas ce que nous recherchons désespérément ? L'harmonie, l'équilibre, comme dans notre enfance ou en vacances. Mais «Il y a tant de vagues et de fumée - Qu'on arrive plus à distinguer - Le blanc du noir - Et l'énergie du désespoir (...)» chantait Michel Berger dans Le paradis blanc.

«Y a tant de vagues, et tant d'idées - Qu'on arrive plus à décider - Le faux du vrai - Et qui aimer ou condamner (...)». Alors peut-être faut-il mettre à profit ces quelques jours de vacances pour retrouver nos esprits, et retrouver les jours où «On voulait tout le monde refaire». Et «Recommencer là où le monde a commencé (...)- Loin des regards de haine - Et des combats de sang (...) - Comme dans mes rêves d'enfant (...)».