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29/03/2022

Combattre la guerre qui est en nous

Les entendez-vous ceux qui répètent à l'envi l'évidence : "La guerre, c'est pas bien" ? Comme si toute l'Histoire n'était pas une addition de tueries, comme si elle n'exaltait pas les conquêtes sanglantes, comme si nous ne piétinions pas des millions de restes d'humains envoyés ad patres, comme si la mort naturelle ou la mort de vieillesse étaient cause de la majorité des décès, comme si la mort violente n'était pas partout.

Les voilà épouvantés par le recours à la force, alors que combien se groupent afin d'être plus forts, roulent les mécaniques pour impressionner, répondent à la menace par la menace, privilégient les rapports de force jusqu'à l'épreuve de force. Ces "partisans de la paix", de quoi sont-ils capables dans leur vie de tous les jours pour avoir le dessus ? Ces pacifistes sont-ils pacifiques ? Sont-ils si différents des bellicistes ?

En tête des manifestations, ces agitateurs ou activistes n'aimeraient-ils pas plutôt imposer leur paix comme leur idéologie, et ne voir qu'une seule tête ? Mais la paix ne se décrète pas et «La véritable paix implique la reconnaissance du conflit et des différences» (Armand Abécassis). Est-ce le cas ? Sont-ils tolérants quand ils s'autoproclament, comme d'autres, membres du camp du Bien, et qu'ils jouent de l'intimidation ?

Tellement suffisants, ils n'hésitent pas pour la bonne cause à "éliminer" les "mal-pensants". La démocratie leur offre une panoplie d'armes non létales : ne pas donner la parole, faire taire ou discréditer sont trois façons de "tuer" le citoyen galeux ou le débat. Ils ont "la vérité" et parfois la majorité pour eux, cela leur suffit pour couper court à toute discussion. Sans honneur et toute honte bue, ils aiment vaincre sans péril.

Ils ne voient pas que la guerre permanente que beaucoup font aux autres (et à eux-mêmes aussi) dans notre monde d’"hyper-compétition", est similaire dans sa mécanique aux guerres meurtrières qu'ils combattent. Au quotidien : défense d'intérêts, arrogance, agressivité, hostilité, colère ; manœuvres, pressions, provocations, attaques, humiliations ; rivalités, querelles, luttes, règlements de comptes, vengeances...

Et nos sociétés communient ainsi dans des tensions perpétuelles jusqu'à la rupture, dans la violence contenue ou exprimée. Ouvrons les yeux, la violence est en nous tous, et les victimes de cette guerre totale se comptent par millions. La paix ne viendra que de notre volonté de la dompter, en adoptant une attitude paisible, douce et mesurée, mais aussi respectueuse, attentive, attentionnée, équitable et conciliante.

21/11/2019

Du mensonge à la violence

Quoi de plus fragile qu'un système politique et économique fondé sur la confiance des citoyens et le moral des ménages et des chefs d'entreprise ?! Car rien de plus versatile que ce sentiment et cette disposition qui relèvent de l'état d'esprit passager. Celui-ci nécessitant continuellement d'être renouvelé par une propagande rassurante, un endoctrinement serinant toujours la même chanson : "Vous pouvez dormir tranquille".

La doctrine, l'idéologie progressistes endorment ainsi la vigilance en justifiant toute évolution, réforme ou révolution par la nécessité de tendre vers un idéal. Une société idéale en perpétuel devenir, qui recule sans cesse au fur et à mesure des avancées. Mais même si la perspective d'un "âge d'or" à venir s'estompe, il reste la conviction d'aller dans la bonne direction, d'un développement en bien. Ce qui n'est pas sans risque.

Car la certitude d'une finalité, d'une irréversibilité, peut amener à un comportement passif, résigné. Mais elle peut tout autant amener à un comportement directif voire autoritaire. D'un côté, le destin, la fatalité, le sort inéluctable ; de l'autre, le but, l'objectif, la fin en soi, irrévocable. D'un côté, accepter, supporter, subir ; de l'autre, contrôler, contraindre, dominer. De l’"Impuissance de la volonté" à la "Volonté de puissance".

Mais la volonté sans l'intelligence et l'action sans la pensée - quand le pouvoir les impose - conduisent à l'impasse. Le changement "sans raison" fait fi de la volonté générale, de l'intérêt commun. "Nécessité fait loi". La liberté est de fait abolie. Les minorités commandent à la majorité. Le contrat social est brisé. Personne ne se sent plus obligé. Le corps social se désunit. L'intérêt particulier l'emporte. L'égoïsme triomphe.

Jusqu'au réveil brutal, quand les citoyens, les salariés, les consommateurs finissent par ouvrir les yeux. Jusqu'à la crise de confiance, quand les discours lénifiants, la dissimulation, le mensonge, l'intoxication... ne suffisent plus à maintenir artificiellement le moral, la confiance dans le "système" et dans l'avenir. Jusqu'au «tournant critique», quand «le peuple a retiré son consentement aux actes de ses représentants (...)».

Car alors, conclut Hannah Arendt dans Du mensonge à la violence : «tout affaiblissement du pouvoir est une invite manifeste à la violence - ne serait-ce que du fait que les détenteurs du pouvoir, qu'il s'agisse des gouvernants ou des gouvernés, sentant que ce pouvoir est sur le point de leur échapper, éprouvent toujours les plus grandes difficultés à résister à la tentation de le remplacer par la violence». Toute ressemblance...