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23/08/2013

On n'a pas fini de rêver

Fini de rêver, c'est la rentrée. Pourtant, il flotte comme un air de vacances prolongées. L'été se veut indien. Le soleil, contraint et forcé, voit son horizon se raccourcir, mais les peaux bronzées ne se font pas à l'idée de blanchir. Les esprits sont encore alanguis par la quiétude et les nez emplis des senteurs estivales. Les oreilles croient toujours entendre les bruissements de la nature qui s'endormait à la nuit tombée et les yeux demeurent éblouis par cette lumière qui ruisselait de ciels d'azur. Que ces heures furent douces et délicieuses.

Hier encore, nous nous promenions sur des rivages enchanteurs, nous nous prélassions au bord de l'eau, nous déambulions dans des ruelles de villages, nous marchions à l'ombre de forêts profondes, nous gravissions des pentes escarpées qui s'ouvraient sur de somptueux panoramas. Les vagues venant mourir sur les rochers, la mer frissonnant sous le vent, les glaciers s'effondrant des sommets argentés, les torrents dévalant les prairies étagées, les lacs se reposant au creux de leur écrin, tout est déjà loin. Peut-être les reverrons-nous l'année prochaine, si tout va bien. Toute une année à attendre, à ne plus voir que le mur d'en face et le passage dans la rue, à se résigner au vacarme de la ville et aux gaz d'échappement...

Bien sûr, il y a le rêve, celui que l'on fait éveillé, dont on se souvient et qui fonde nos projets. Il nous fait espérer à une autre vie. Celle qui nous permettra d'être toujours en vacances. Ah ! si je n'avais pas à "gagner ma vie", nous disons-nous en ces périodes de reprise. Plus d'horaires, plus de contraintes. Le choix de faire ce que l'on veut. Du temps pour lire, écrire, penser, pour visiter des expositions, assister à des conférences, aller au théâtre, à l'opéra, au cinéma, écouter de la musique, reprendre des études, s'occuper de ses enfants ou de ses petits-enfants, s'engager dans des associations, s'adonner à des loisirs, bâtir une maison, cultiver son jardin... Et là, comme devant ces paysages de vacances qu'on ne se lasse pas d'admirer, regarder passer le temps loin des laideurs, des puanteurs et des rumeurs du monde. 

Mais fini de rêver, c'est la rentrée. Heureusement, il y a l'espoir de brumes évanescentes et de feuillages fauves, de neiges immaculées et de sombres sapins, de pluies fines et de rosées légères, de fleurs éphémères et de verts tendres. Heureusement, il y a l'espoir d'un nouvel été. Heureusement, il y a la vie et cette envie de continuer. On n'a pas fini de rêver.

 

02/10/2012

Le savoir, pour quoi faire ?

Avec la rentrée des étudiants, ce sont maintenant environ 15 millions d'enfants, d'adolescents et de jeunes adultes qui apprennent, s'instruisent, étudient, se forment, se cultivent. Le savoir est la clé de la réussite scolaire et de la réussite professionnelle. Amasser, posséder des connaissances n'est cependant pas un but en soi. Encore faut-il savoir, vouloir et pouvoir s'en servir, mais pour quoi faire ?

On peut lire dans le projet éducatif d'un établissement catholique d'une grande ville française que celui-ci «poursuit des fins culturelles et la formation humaine des jeunes». Et un peu plus loin, un titre rappelle l'évidence : «Une école qui enseigne» ; un enseignement qui «contribue à former des adultes ouverts et responsables qui sauront trouver leur place dans la société». Mais est-ce une évidence pour tout le monde ?

Quant à la réussite, celle-ci «ne s'évalue pas sur le seul critère des notes, mais intègre également la capacité de l'élève à progresser, à s'investir dans une activité, à entrer en relation et à se préparer à une vie responsable. Dans cet esprit, les conseils de classe et les bulletins scolaires, les encouragements mais aussi, lorsqu'il y a lieu, les sanctions, sont considérés comme des moyens d'aider le jeune à se connaître, à progresser et à s'orienter».

Mais l'objectif final, quel est-il ? Cet établissement répond qu'il «ne transmet pas la culture comme un moyen de puissance et de domination, mais comme un moyen de communication et d'écoute de la voix des hommes, des événements, des choses. Il ne voit pas dans le savoir un moyen d'arriver au succès ou d'amasser des richesses mais un devoir de service et une responsabilité envers les autres».

Un grand établissement parisien renchérit : «Tout élève qui développe ses qualités, réussit scolairement, connaîtra un vrai sens à sa vie, une vraie joie s'il est tourné vers les autres. N'oublions jamais la parabole des talents et la nécessité d'être toujours attentif "aux petits" au sens biblique du terme».

L'école prend ici une dimension éducative où, avec les parents, la transmission de savoirs certes mais aussi de valeurs et de principes, repose sur la reconnaissance d'un héritage commun. L'école et nous-mêmes sommes les relais de la connaissance et de la sagesse accumulées depuis des millénaires. Le savoir pour soi n'est qu'une affaire de pouvoir et d'avoir. Le savoir doit être échangé, partagé, comme un don, un legs reçu puis rendu, comme on passe un flambeau. Le savoir doit être profitable, salutaire à tous : bienfaisant. Simple question de savoir-vivre, de volonté d'être utile et de s'acquitter de ses obligations. Quoi de plus normal qu'il soit beaucoup demandé à ceux qui ont beaucoup reçu.

Toutefois il reste une question. Dans notre "économie du savoir", celui-ci sert-il principalement à "faire le bien" ou plus précisément à "faire le maximum de bien et le minimum de mal" ?