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23/01/2020

Longue et heureuse vie !

Le bon sens semble faire défaut à nombre d'entre nous. En lisant La Billebaude d'Henri Vincenot, l'écrivain bourguignon, on peut se rendre compte que celui-ci n'en manquait pas. Ainsi, à propos de l'espérance de vie, Henri Vincenot cite des «vieux» de son village au début du XXème siècle, pour beaucoup âgés de plus de 85 ans, quand ils ne dépassaient pas allègrement les 90 ans : «Tout cela pour dire (...) deux choses : premièrement, que la jeunesse d'aujourd'hui aurait tort de s'imaginer que tout le monde, jadis, mourait de sous-développement à quarante-cinq ans, comme les astuces de la statistique tendent à le faire croire aujourd'hui. Secondement, que le genre de vie absolument primitif et aussi peu hygiénique que possible qu'avaient mené ces vieilles gens ne conduisait pas à la déchéance, tant morale que physique».

Henri Vincenot note combien «tous ces vieux» vivant au domicile de l'un de leurs enfants (frères et sœurs dédommageant ce dernier), restaient actifs et donnaient la main : «Si je vous raconte cela, c'est pour vous montrer comment étaient alors réglés ce qu'on appelle maintenant les "Problèmes du troisième âge". On peut avoir intérêt à méditer là-dessus, en notre grandiose époque qui pratique si délibérément l'abandon officiel des enfants et des vieillards, tout en leur consacrant par ailleurs tant d'articles exhaustifs dans la presse, tant de discours à la tribune et tant de crédits pour réaliser à leur égard la ségrégation des âges avec les crèches, les écoles enfantines, les asiles et les maisons de retraite. Pour parler clair, je dirai qu'il n'y avait pas de "problème de l'enfance" ni du "troisième âge", parce que la famille assumait alors toutes ses responsabilités».

Plus loin et pour finir, Henri Vincenot évoque l'arrivée d'un poste à galène chez ses grands-parents et la réaction du grand-père : «(...) en quelques instants, il avait appris tant de catastrophes et de menaçantes foutaises, qu'il avait piqué une colère noire. (...) et il s'était mis à manger moins, à ne plus pouvoir s'endormir avant neuf heures du soir, à rabrouer son monde (...). Bref, la famille sombra (...), écrasée par la plus maligne des maladies épidémiques : L'INFORMATION ! (...). Un jour que le bavard du micro rendait compte de l'effondrement des cours, de "l'effroyable montée du chômage", des grèves et des premières occupations d'usines, je le vis se congestionner comme un coq-dinde amoureux, arracher les écouteurs, en faire, avec le fil de prise de terre, un paquet qu'il envoya directement dans les cendres de la cheminée en criant : (...) Vous voyez pas que ce sacré vains dieux d'appareil va (...) me gâcher mon bon temps ? (...). Mon grand-père venait, sans peut-être s'en rendre compte, de prolonger sa vie de vingt ans et sans doute davantage».

Longue et heureuse vie !

08/03/2013

L'espérance fait vivre

Peut-on vivre sans espérance ? Nous avons vu la dernière fois la progression historique de l'espérance de vie (c'est-à-dire la durée moyenne de vie, établie statistiquement sur la base des taux de mortalité). Mais l'année dernière en France métropolitaine, 560 000 décès ont été enregistrés pour un taux brut de mortalité de 8,6 décès pour 1000 habitants qui «ne baisse plus depuis 2004» indique l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), ajoutant que «l'espérance de vie marque le pas».

De son côté, l'Institut national d'études démographiques (Ined) s'interrogeait dans son numéro de décembre 2010 de Population et sociétés, "Espérance de vie : peut-on gagner trois mois par an indéfiniment ?". Quant à Lylian Le Goff, docteur en médecine, membre de la mission "Biotechnologie" de France Nature Environnement, et à Philippe Desbrosses, agriculteur, docteur en sciences de l'environnement, soucieux de la prévention des risques, c'est dès 2002 qu'ils faisaient part de leur inquiétude pour l'avenir.

Dans le livre Combien de catastrophes avant d'agir ? Manifeste pour l'environnement signé de Nicolas Hulot et du Comité de veille écologique, aux éditions du Seuil, ils semblaient même trouver un peu légères les promesses de vieillesses infinies. «L'espérance de vie, écrivaient-ils, est liée à la qualité de vie, qui elle-même résulte de nombreux facteurs, non seulement alimentaires et sanitaires, mais aussi socio-économiques ; ...

«... les effets de ces facteurs se manifestent avec un décalage dans le temps qui est de l'ordre de deux à trois générations (...).» Pour résumer, la longévité des générations présentes résulterait selon eux pour l'essentiel, des conditions de vie passées, et ne présumerait en rien la longévité des générations futures. «Rien n'est jamais acquis à l'homme (...) Et quand il croit Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix (…)» dirait Aragon.

De fait, «nous assistons, continuaient-ils, non seulement à l'accroissement des pollutions et à l'altération de la qualité intrinsèque des aliments, mais aussi à une remise en cause globale de la qualité de vie, dont les effets les plus néfastes se manifesteront avec un décalage». Et ils rappelaient que «faute de répondre aux qualités nécessaires à l'entretien de la vie, l'alimentation joue un rôle dans 80 % des maladies (40 % des cancers)».

D'ailleurs, «les cancers sont de plus en plus nombreux, particulièrement chez de jeunes adultes, ce qui est significatif, prétendaient-ils, de l'altération des conditions de vie, notamment par la pollution». D'où la possibilité d'une «cassure de l'espérance de vie» annoncée par certains épidémiologistes, en particulier de l'Office mondial de la santé. Si cela s'avérait exact, quelle espérance resterait-il alors à l'homme, pour vivre ?