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03/12/2019

Mondialisation : et l'homme dans tout ça ?

Il y a près de dix-huit ans, la mondialisation était au centre des débats. Jean-François Revel y revenait dans son livre L'obsession anti-américaine paru en 2002 chez Plon. Sa thèse se fondait sur l'idée que ce n'était pas tant la mondialisation qui était critiquée mais sa "déclinaison" américaine et économique. Pour lui, derrière l'antimondialisme se cachait en fait un antiaméricanisme de longue date, et aussi un antilibéralisme.

Les États-Unis ont de tout temps suscité des sentiments antagonistes d'attirance et de répulsion. D'autant qu'ils nous ont sauvés de nous-mêmes par deux fois au cours du siècle dernier et que, suivant un comportement bien connu des sauveteurs, une furieuse ingratitude saisit parfois les rescapés, vexés d'être redevables de la vie à "plus capable", à "plus grand", à "plus fort que soi".

Leur statut unique de superpuissance, ils le doivent en bonne partie à nos inconséquences et à la ruine causée par deux guerres mondiales et deux totalitarismes : le national-socialisme et le communisme. Ils le doivent aussi à notre incapacité à construire une Europe politique. Et les voici rayonnant de leur superbe dans tous les domaines : économique, technologique, militaire et culturel.

«Plus décisif sans doute encore a été, n'en déplaise aux socialistes passés et présents, la victoire globale du modèle libéral, du fait de l'effondrement du communisme» appuyait l'auteur. Contre l'américanisation, les antimondialistes sont aussi contre la libéralisation, et encore ! : la libéralisation de l'économie et non celle des mœurs. Mais la «mondialisation idéologique et politique» a leur faveur.

L'internationalisme socialiste était de fait une tentative de mondialisation, le plus souvent «planifiée, dirigée voire même imposée». Mais poursuivait Jean-François Revel : «Le mondialisme dirigiste a toujours été fauteur de catastrophes humaines ou, de toute manière, dans les moins mauvais cas, de naufrages économiques beaucoup plus douloureux pour les peuples que les pires injustices capitalistes».

A voir. En tout cas, ces dernières ne doivent pas être occultées. Car si certaines sont inhérentes à la nature humaine, d'autres traduisent un mépris de l'être humain qui se trouve chosifié, instrumentalisé. Et là on peut se demander si le libéralisme et le socialisme ne se sont pas en fait rejoints sur une vision matérialiste de l'existence, oubliant que «L'homme ne vit pas seulement de pain».

Ce à quoi ajoutait Ernest Renan : «mais il vit aussi de pain». Nourritures terrestres et nourritures spirituelles sont nécessaires à l'homme. «(...) Quand tout homme est pourvu du nécessaire, écrivait Charles Péguy, du vrai nécessaire, du pain et du livre, que nous importe la répartition du luxe ?» Mais quand le nécessaire vient à manquer pour de plus en plus d'hommes, alors la répartition du superflu devient la seule question qui compte.

28/01/2014

L'homme : une grande cause

«Les enfants commencent tous par la métaphysique, les adolescents continuent dans la morale, et nous les adultes, nous finissons dans la logique et la comptabilité.» Daniel Pennac, en quelques mots, décrit la déchéance que peut constituer le passage à l'âge adulte. Et l'on peut affirmer peut-être que le monde adulte ne serait pas ce qu'il est si les adultes qui le composent se nourrissaient de métaphysique et de morale.

Mais voilà, la philosophie et l'éthique, "c'est fait pour les intellos", "ça n'intéresse personne", "ça ne fait pas vendre", etc., disent les dédaigneux. Foutaises ! Les choses terrestres ne suffisent pas à nourrir leur homme. Il lui faut des nourritures spirituelles qui nécessitent certes un effort intellectuel (et pourquoi pas ?!), mais après l'effort, quelle récompense ! La lecture, passage obligé quoi qu'on dise, nourrit notre esprit, l'élève.

En fait, nous devrions toute notre vie nous considérer comme des élèves et oser convenir que nous ne savons pas, ou pas grand-chose. Recevoir ou suivre l'enseignement de maîtres, voilà le droit que devrait avoir tout homme ; transmettre cet enseignement à ceux qui n'y ont pas accès, voilà le devoir de tout initié. Car, avec Spinoza, nous devons soutenir obstinément "qu'il faut désirer pour l'autre ce que l'on veut pour soi".

Tout être humain mérite ce qu'il y a de mieux. Pouvoir se référer aux meilleures pensées des meilleurs esprits permet d'éviter de penser en rond, de raisonner à vide. Observer, lire, réfléchir pour "avoir du jugement", rien là de surhumain mais tout au contraire de proprement humain. S'en dispenser, c'est se mépriser ; en dispenser les autres, c'est les mépriser. Et "Si vous n'aimez pas ça, n'en dégoûtez pas les autres !".

Alors que tout défenseur d'une certaine idée, d'une haute idée de l'homme se lève et ferraille avec panache contre les contempteurs de la philosophie et de la morale, avec leur logique et leur comptabilité, en s'exclamant comme Cyrano de Bergerac sous la plume d'Edmond Rostand : «Que dites-vous ?... C'est inutile ?... Je le sais ! Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès ! Non ! non, c'est bien plus beau lorsque c'est inutile !

«Qu'est-ce que c'est que tous ceux-là ! Vous êtes mille ? Ah ! je vous reconnais, tous mes vieux ennemis ! Le Mensonge ? Tiens, tiens ! - Ha ! ha ! les Compromis, les Préjugés, les Lâchetés !... Que je pactise ? Jamais, jamais ! - Ah ! te voilà, toi la Sottise ! Je sais bien qu'à la fin vous me mettrez à bas ; N'importe : je me bats ! je me bats ! je me bats !» Oui, battons-nous, même si la cause semble perdue, car ce qui est en cause, c'est l'homme.