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05/04/2018

De grands serviteurs si petits

Les serviteurs zélés des soi-disant intérêts supérieurs se trouvent aux postes clés. Ils sont choisis sur leurs capacités ou devrait-on dire leurs réflexes pour masquer, couvrir, justifier, étouffer. Ils se distinguent par une aisance hors norme à l'oral, par une dialectique diabolique et un sang-froid à toute épreuve. Ils préfèrent le travail de représentation plus valorisant que le travail de fond qu'ils délèguent.

Ni plus intelligents que leurs collègues, ni plus expérimentés, ils parviennent à ces postes à responsabilités grâce à la haute idée qu'ils ont de ces responsabilités et d'eux-mêmes. Leur soumission à la Cause et leur servilité envers le pouvoir sont les critères décisifs qui les font arriver. Les scrupules ne les étouffent pas. Ils sont sélectionnés sur cette indéniable qualité de ne pas se poser de questions.

Arrivistes ? Sans doute. Mais plus précisément opportunistes. Prêts à transiger avec les principes, les règles et les lois, ils tirent parti des circonstances et des personnes pour faire triompher leurs intérêts immédiats, qu'ils soient personnels, professionnels ou partisans. Ils sont les adeptes d'un autoritarisme sournois qui perdure dans les arcanes d'une démocratie triomphante sur le papier.

Ils se servent, tout court, mais aussi de grands mots dont ils ignorent le sens exact et la portée et l'exigence. Plus d'ailleurs que leur signification, c'est leur sonorité qui trouve écho dans le cœur de ceux qui les écoutent encore. Bien sûr, leurs discours ne sont pas d'eux mais ils les disent avec un talent consommé de comédiens, et usent comme eux de l'artifice, de la simulation et du mensonge.

Si on leur disait qu'ils sont les pires ennemis de la Pensée, ils ne cilleraient pas. Ils n'en ont qu'une idée vague ou un souverain mépris, de même que de la liberté. Le pouvoir leur suffit, et l'argent. Car on sait se montrer généreux pour ces hommes rares et eux savent renvoyer l'ascenseur. Ils travaillent par réseau. Leur carnet d'adresses est leur force. Ils peaufinent leur relationnel.

Mais derrière les sourires, les civilités et les flatteries, ils sont en fait plus sauvages que des bêtes et n'hésitent pas à frapper dans le dos. Car dans leur jungle, il s'agit d'abattre et non de se battre :à armes égales. De la censure à des mesures plus radicales en passant par la calomnie, l'intimidation, le chantage, la menace..., ils emploient toutes les bassesses. Ils sont la lie de notre société.

11/04/2014

Les réseaux contre le bien commun

Le réseau est le nom "correct" employé à la place de ceux "incorrects" de bande, caste, cercle, chapelle, clan, classe, clique, club, coterie, mafia, secte, tribu... Ce qui réunit leurs membres : des intérêts communs. On se rend service, on se "rend la pareille". On sollicite et on procure aide, appui, bienfait, faveur... On se soutient, on se protège. On se refile des tuyaux, on est dans la combine. On se soude et on "dessoude".

L'exclusion est l'envers de l'admission. On en est ou on n'en est pas. Le parrainage est apporté à une personne sur la base de ce qu'elle peut apporter. Donnant, donnant. L'utilité est le mot-clé. «Les hommes vous estiment en raison de votre utilité, sans tenir compte de votre valeur» notait déjà Balzac. Et la complaisance fait le reste. «La complaisance (crée) des amis» écrivait Térence. Et il ajoutait : «La franchise engendre la haine».

Romain Rolland confirmait en avançant que «La plupart des amitiés ne sont guère que des associations de complaisance mutuelle». Une complaisance qui se rend coupable en "laissant faire, en acquiesçant pour ne pas déplaire". De l'indulgence à la connivence, il n'y a qu'un pas. La solidarité quand il s'agit de ne pas nuire aux autres membres ou bien de leur porter assistance, peut en effet tendre à la lâcheté et à la complicité.

La serviabilité chez ces gens-là, jusqu'à l'obséquiosité, dissimule la recherche d'un avantage personnel, d'une récompense. L'indépendance, le refus d'entrer dans ce jeu, de jouer le jeu sont très mal vus. N'avoir besoin de personne, vouloir ne rien devoir à personne sont des offenses à l'esprit de corps, l'esprit de famille, à cette dépendance qu'ils veulent imposer. Ils aiment faire tomber sous leur coupe et mettre en coupe réglée.

Mais en se servant de leur(s) réseau(x) et de ses ou leurs membres pour leur profit exclusif, à "rechercher l'intérêt de leur groupe", ils peuvent en venir à ne plus "tenir compte des règles sociales et des lois de la société". C'est le clanisme. Dans sa version soft et professionnelle : le corporatisme. Balzac encore, écrivait que «la loi de l'Intérêt général (...) est détruite par la loi de l'Intérêt particulier (...) qui engendre l'égoïsme».

Les réseaux sont des combinaisons d'intérêts particuliers convergents. Additions d'égoïsmes, ils participent à la ghettoïsation de la collectivité nationale ; un communautarisme ferment de divisions quand les intérêts divergents deviennent inconciliables. Agir uniquement par intérêt nous mène à agir contre l'intérêt des autres et nous monte les uns contre les autres, alors que, disait Camus, «Le bien public est fait du bien de chacun».