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15/01/2024

"Et toi mon coeur pourquoi bats-tu"

Paru la même année que C'était bien mais cette fois chez Robert Laffont, peut-être faut-il lire ce livre de Jean d'Ormesson en écoutant un Requiem, ou une œuvre de musique sacrée comme Israël en Egypte de Haendel (Chœur et Orchestre Monteverdi, sous la direction de John Eliot Gardiner, chez Erato). Il y a là un souffle qui escorte le lecteur, du printemps à l'hiver de la vie, à travers ce que l'écrivain a toujours aimé : la littérature et la poésie. Avec comme un pincement au cœur : l'hiver est déjà là.

Cette promenade dans les textes et les vers que Jean d'Ormesson connaissait par cœur, s'ouvre sur Les matins de printemps avec Ronsard : «Je n'avais pas douze ans qu'au profond des vallées, (...) Sans avoir soin de rien, je composais des vers». Ah ! l'insouciance de la jeunesse. «Je me levais avec le soleil et j'étais heureux» confie Rousseau. Et La Fontaine ajoute : «Aimez, aimez, tout le reste n'est rien».

Les flammes de l'été embrasent les êtres. Hugo brûle : «Et je lui dis : Veux-tu, c'est le mois où l'on aime, Veux-tu nous en aller sous les arbres profonds . Montherlant décoche un trait de lumière : «Tant de choses ne valent pas la peine d'être dites ; et tant de gens ne valent pas que les autres choses leur soient dites. Cela fait beaucoup de silence». Et l'illumination vient de Proust : «On n'aime plus personne dès qu'on aime».

Et puis voici Les soirs d'automne. «Voici moins de plaisirs, mais voici moins de peines» pense d'Aubigné. Mais Musset pleure : «Ah ! laissez-les couler, elles me sont bien chères, Ces larmes que soulève un cœur encor blessé ! Ne les essuyez pas, laissez sur mes paupières Ce voile du passé !...». Lamartine s'attriste : «Mon cœur, lassé de tout, même de l'espérance». «Prenez garde à la tristesse. C'est un vice» répond Flaubert.

Les nuits d'hiver tombent trop tôt. A l'âge où, dit Hugo, «Ils ont ce grand dégoût mystérieux de l'âme Pour notre chair coupable et pour notre destin ; Ils ont, êtres rêveurs qu'un autre azur réclame Je ne sais quelle soif de mourir le matin !...». Un «sommeil noir» saisit Verlaine : «Dormez, tout espoir, Dormez, toute envie ! Je ne vois plus rien, Je perds la mémoire». Reste une prière, d'Apollinaire : «Hommes de l'avenir souvenez-vous de moi».

Cette «histoire du temps qui passe» s'achève sur : «Le plus important, c'est Dieu - qu'il existe ou qu'il n'existe pas». Une citation attribuée à un anonyme qui pourrait bien être Jean d'Ormesson lui-même. Qui nous laissait en guise de testament peut-être, le secret de «La vie selon d'Ormesson» : garder les yeux levés vers l'homme et la création, vers l'art et les créations, vers le Ciel et le Créateur ; s'élever, ne jamais se mettre au-dessus.

 

01/10/2013

Devenir un homme digne de ce nom

«On entre, on crie et c'est la vie On crie, on sort et c'est la mort Un jour de joie, un jour de deuil Tout est fini en un clin d'œil» écrivait Voltaire. Voici donc l'existence humaine : un clin d'œil à l'échelle du temps. Autant donc tout faire pour que ce temps très court soit un moment de plénitude, en cherchant toujours à s'élever, à progresser, à s'améliorer. D'où pour l'enfant l'importance d'avoir des parents qui s'engagent à l’élever.

Car si élever un enfant, c'est-à-dire l’"amener à son plein développement physique et moral", c'est certes l'entretenir, le nourrir, le soigner, l'éduquer, le former, c'est peut-être aussi l'ennoblir. Pas seulement l'aider à grandir, mais le grandir. Et faire en sorte qu'une fois mûr, il puisse être libre le plus possible, décider vraiment de ce qu'il fera de sa vie. Ce qui est en fait, même dans nos "nations libres", le privilège que de quelques-uns.

Protéger leur enfant du nivellement par le bas qu'on soupçonnerait presque d'être voulu par la société, tel est le défi lancé aux parents. Et pour cela il s'agit pour eux de le considérer dès le début comme un être unique, sans précédent. Jamais vu avant donc, mais également qui ne sera plus jamais vu après. Puis lutter contre l'uniformisation en marche quand la garderie ou l'école le happe pour le préparer au monde, le socialiser.

Le Professeur Hubert Montagner cité par Laurence Pernoud dans son livre J'élève mon enfant chez Pierre Horay Editeur, note que «L'imitation des autres, les interactions et les jeux (...), donnent à chacun l'envie de faire comme l'autre, ou avant l'autre, ou encore mieux que l'autre». Le conformisme commence ainsi peut-être là, de même que la compétition, dans la crèche, la classe et la cour. Et sont même encouragés par des éducateurs.

Pour les parents qui souhaitent que leur enfant se distingue des autres sans se battre pour les places, les "bons points" et les "images", il leur faut lui éviter de "penser comme les autres" en le rendant capable de "penser par lui-même", et en même temps, le porter à penser aux autres au lieu de ne penser qu'à lui-même. Alain disait : «ma vraie devise d'homme : me penser moi-même le moins possible, et penser toutes choses».

Rien ne devrait pouvoir échapper à l'examen critique. Une éducation digne de ce nom devrait éveiller le désir de savoir, inciter à se poser des questions, susciter la remise en question. Faire que chez l'enfant l'ignorance crée un manque et qu'il ait toujours l'envie de le combler, de chercher à apprendre, à comprendre, à devenir meilleur, et qu'ainsi il puisse choisir, décider en connaissance de cause. C'est-à-dire : être un homme digne de ce nom.