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06/05/2014

Un art voué à la destruction ?

En introduction d'un triptyque sur l'art, avant d'aborder sa marchandisation et la disparition de la rébellion, une interrogation : d'où vient cette impression que l'art n'est plus ce qu'il était ? Précisons d'abord ce qu'on appelle "arts" : la peinture, la sculpture, l'architecture, la musique, la poésie, la danse, auxquels sont venus s'amalgamer le septième art : le cinéma, le huitième : la télévision, le neuvième : la bande dessinée, etc.

Puis surtout est venu l'art pour l'art, portant en lui sa propre justification et perdant son rôle symbolique, où la créativité "prend le pas" sur la représentation d'un monde sensible, réel ou imaginaire, sur le sens, la signification. On peut noter que le terme de beaux-arts désignait les arts qui ont pour objet la représentation du beau (architecture, gravure, peinture, sculpture), dorénavant plus connus sous le vocable d'arts plastiques.

Mais qu'est-ce que le beau ? C'est là peut-être que trouve son origine le malaise de nos contemporains devant l'art de leur époque, souvent abstrait et donc abscons. Bien sûr, des artistes modernes ont beau jeu d'avancer que l'art est en avance sur son temps. On pourrait aussi arguer qu'avec le temps, par accoutumance, le public tolère de mieux en mieux les nouvelles formes d'art, s'habitue à tout et ne s'étonne plus de rien.

Et puis ce serait faire peu de cas de tous ces artistes immortels qui déjà à leur époque connaissaient la renommée. Au fond, l'art censé toucher l'être humain au plus profond de lui-même répond-il toujours aujourd'hui à sa vocation ? Retour aux définitions. Dans l'absolu, l'art est selon un Petit Robert des années 90 l’"Expression par les œuvres de l'homme, d'un idéal esthétique", ou encore "Chacun des modes d'expression de la beauté".

Cette définition devient dans un Petit Larousse des années 2000 : "Création d’objets ou de mises en scène spécifiques destinés à produire chez l'homme un état de sensibilité et d'éveil plus ou moins lié au plaisir esthétique", ou "Ensemble de disciplines artistiques, notamment celles qui sont consacrées à la beauté ou à l'expressivité des lignes, des formes, des couleurs". Toute l'évolution de l'art est dans le décalage (souligné) entre ces définitions.

Dans un monde d'objets, de Simulacres et simulation, de sensations, de "menus plaisirs", de libre expression revendiquée..., l'art est à l'avenant. Mais à quoi peut être vouée cette part de l'art d'aujourd'hui qui fait primer l'idée artistique sur l'œuvre, cherche à "être de son temps", à "faire événement" ? Se pourrait-il que ces formes d'art - entre égocentrisme, nihilisme et spéculations - n'aient d'autre destin que de s'autodétruire ?

27/09/2013

Comme des petits enfants

Quand une vie nouvelle commence, très vite une question se pose concernant l'enfant : boit-il assez ? Certains soutiennent que le biberon permet de donner exactement la quantité voulue ; d'autres que «lorsqu'un enfant tète sa maman, il prend lui-même la quantité dont il a besoin (...). Mais [qu']avec l'enfant nourri au biberon, on n'est pas sûr que les rations de lait qu'on a décidé de lui donner (...) soient adaptées à ses besoins».

C'est l'avis de Laurence Pernoud qui dans J'élève mon enfant (Editions Horay) - la bible des jeunes parents - ajoutait qu'en effet, «Au même poids et pour le même âge, certains bébés ont besoin de plus de nourriture, quelquefois un tiers en plus». Et Laurence Pernoud allait même plus loin : «l'expérience vous enseignera d'ailleurs que, d'une manière générale, les enfants savent mieux que quiconque ce qui leur est nécessaire».

Ne serait-ce pas le cas des adultes aussi ?! En filigrane apparaît en effet la question des besoins de l'individu dans une société qui peut vouloir décider pour lui des normes, de ce qui lui correspond théoriquement, et dans une économie où le capitalisme «ne se conforme pas aux besoins : il les a presque tous créés» écrivait Jacques Chardonne. Ces besoins dont la satisfaction ne semble pourtant pas faire le bonheur.

Car cet "individu conforme" réclame-t-il ? pleure-t-il et crie-t-il ? dort-il bien ? Bref, a-t-il l'air satisfait de son sort comme un bébé bien nourri ? Pas vraiment, et l'explication est peut-être à aller chercher du côté de la non satisfaction d'autres besoins. Malgré un "état de besoin" créé par l'accoutumance à la consommation - entre désir de continuer et effets nuisibles -, l'individu ressentirait-il en fait un manque plus profond ?

Car «(...) l'enfant des villes rêve de campagne. Lorsqu'on lui demande de dessiner l'endroit où il voudrait vivre, il montre une maison, petite, au milieu d'un pré, avec des arbres, des fleurs, souvent des oiseaux et plus loin une rivière». Ce qu'offre la société n'est peut-être pas adapté aux vrais besoins de l'homme. On dit que "Le mieux est l'ennemi du bien", peut-être que le mieux-être est l'ennemi du bien-être, pour paraphraser Ivan Illich.

Et de fait, les envies de s'évader, de renaître, de commencer une nouvelle vie n'ont rien à voir avec des rêves de grandeurs et de châteaux en Espagne. Elles expriment au contraire le besoin de mener une vie simple, naturelle. «Bienheureux les pauvres en esprit», "ceux qui se veulent pauvres, qui sont pauvres en intention", qui se passent du superflu mais ne manquent pas du nécessaire. Bienheureux comme des petits enfants.