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11/07/2019

La réforme ou la révolution ?

Pour les partisans de la révolution miraculeuse «dispensant de résoudre les problèmes» (Simone Weil), rappelons ce qu'inspira à des penseurs la révolution, notamment celle de 1789, bientôt commémorée par des défilés militaires, des bals populaires et des feux d'artifice. Histoire de réfléchir au delà du «Ah ! ça ira, les aristocrates à la lanterne. Ah ! ça ira, les aristocrates, on les pendra».

Il y a d'abord Victorien Sardou qui écrit : «L'émeute, c'est quand le populaire est battu : tous des vauriens !... La révolution, c'est quand il est le plus fort : tous des héros». Mais Victor Hugo affirme que «La populace ne peut faire que des émeutes. Pour faire une révolution, il faut le peuple». Y aurait-il donc un bas peuple et un haut peuple ? Une France d'en bas et d'en haut en quelque sorte ?

Et si celle d'en bas peut s'écrier parfois comme Ruy Blas (Victor Hugo) : «Bon appétit, Messieurs ! Ô ministres intègres ! Conseillers vertueux ! Voilà votre façon de servir, serviteurs qui pillez la maison» ; renverser ceux qui se font servir et qui se servent, est-ce "La" solution ? Car Gustave Le Bon note : «Les révolutions n'ont généralement pour résultat immédiat qu'un déplacement de servitude».

Et Giono de renchérir : «La première vertu révolutionnaire, c'est l'art de faire foutre les autres au garde-à-vous». Pourtant, Valéry pense qu'«Une révolution fait en deux jours l'ouvrage de cent ans, (...)», mais poursuit : «et perd en deux ans l'œuvre de cinq siècles». Quant à Montherlant, il fait dire à Porcellio dans Malatesta : «Les révolutions font perdre beaucoup de temps» (à la nécessaire évolution ?).

Mais plus graves que «Des sottises faites par des gens habiles ; des extravagances dites par des gens d'esprit ; (...)», Louis de Bonald ajoute : «des crimes commis par d'honnêtes gens... voilà les révolutions». Car celles-ci transforment "les bourreaux en victimes et les victimes en bourreaux", et «Toute révolution a pour corollaire le massacre des innocents» remarque Charles Baudelaire.

Pour finir, Paul Bourget avance qu'«Une révolution est toujours inaugurée par des naïfs, poursuivie par des intrigants, consommée par des scélérats». Et Daninos donne le coup de grâce : «Les révolutions ressemblent à la grande aiguille des horloges, qui change l'heure, et se retrouve à la même place après un tour de cadran». La révolution, c'est le mouvement ; la réforme, le changement, mais en mieux.

09/11/2018

La France telle qu'elle est (2)

Il y a trois jours nous consultions le premier de deux livres parus en 1994 et 1995, qui avaient eu leur heure de gloire. Passons au second avant de dévoiler les titres et leur auteur ou signataire. Celui-ci enfonce le clou. «Le peuple a perdu confiance. Son désarroi l'incline à la résignation ; il risque de l'inciter à la colère. Plus de la moitié de la population française n'est ni entendue, ni défendue» affirme-t-il avant de s'alarmer.

A force d'être ignorés, «Les ouvriers, les employés, les cadres, les professions intermédiaires, trame de notre tissu social et forces vives de notre pays, peuvent être sensibles aux sirènes de la démagogie». Et puis, «Cinq millions de nos compatriotes vivent dans la précarité ; des centaines de milliers de jeunes cherchent en vain de quoi nourrir ce qui leur reste d'espérance. Les pauvres s'appauvrissent, les bas salaires stagnent.

«Les commerçants, les artisans, les professionnels libéraux, les petits patrons connaissent des difficultés croissantes. De plus en plus de ménages ont du mal à payer leur loyer ou à rembourser leurs emprunts (...). Dans certaines banlieues délabrées des grandes villes, des zones entières sont hors la loi. (...) Trop de Français se sentent incompris et dédaignés. Ils ont peur (...). Chacun sait que la peur entraîne la paralysie.»

«Tandis qu'augmente chaque jour le nombre des exclus, des spéculateurs s'enrichissent, des privilégiés étalent leur vénalité et des clans de circonstance nourrissent des ambitions inavouées, virtuelles ou aléatoires qui occultent sciemment une réalité de plus en plus sombre.» «Au lieu de gouverner, les hommes politiques se sont mis à communiquer en vase clos. Ils ont pris la pose devant les miroirs déformants des médias.»

«Une esthétique du pouvoir a remplacé l'exercice du pouvoir, concédé à (...) des experts technocratiques, des analystes financiers, des éminences lovées dans des cabinets ministériels (...).» «Le peuple est devenu l'oublié d'une démocratie du simulacre et de l'apparence (...). Quand le pouvoir politique abdique, le doute s'empare vite de l'opinion ; les intérêts privés, l'air du temps, les coteries font la loi, les corporatismes se réveillent (...).»

L'auteur ou signataire appelle à la lucidité : «nous sommes à la merci d'une explosion sociale qui peut intervenir sans délai» si ne s'opère pas «une reprise en main du pouvoir par le politique». Vingt-quatre années plus tard, cet "état des lieux" n'a pas pris une ride. Alors donnons d'abord les titres de ces deux ouvrages : Une nouvelle France et La France pour tous. Quant au nom inscrit en haut de la couverture : Jacques Chirac.

12/10/2018

A la recherche de la démocratie perdue

Alors que le fait de pouvoir choisir ses représentants devrait réjouir tout démocrate qui se respecte, pourquoi l'impression que la démocratie se délite persiste-t-elle ? Peut-être devrions-nous nous interroger sur la démocratie elle-même, qui ne peut se réduire au seul suffrage universel, mais qui est supposée accorder à l'ensemble des citoyens la souveraineté, c'est-à-dire le pouvoir, la supériorité.

Si les mots ont un sens, s'ils ne sont pas qu'un vernis, qu'une belle façade, alors sommes-nous en démocratie ? L'avons-nous seulement été un jour ? Si la république, une forme de démocratie parmi d'autres, c'est «le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple», alors le peuple est-il pleinement représenté et pris en considération par la représentation nationale, mais aussi locale ?

Serait-ce un constat fait par les citoyens des limites de la délégation de pouvoir et un manque de représentativité des élus qui rendraient aujourd'hui caduque la démocratie représentative ? Notre société est-elle mûre pour l'introduction d'une part de démocratie directe, afin de contrebalancer un déficit de liberté et d'égalité, en favorisant la participation véritable du plus grand nombre à la vie publique ?

Se peut-il également qu'une forme d'autoritarisme fasse douter les citoyens de leurs institutions et représentants ? En effet, la constitution est censée nous protéger des dérives autoritaires par la séparation des pouvoirs notamment. Mais ne permet-elle pas en fait l'exercice non contrôlé du pouvoir exécutif (ce qui est la définition même d'un régime autoritaire), qui en vient à gouverner par lui-même ?

En effet, qui vote pour "l'exécutif" ? Tout ministre, président ou vice-président de collectivité, maire ou adjoint au maire est désigné, ou élu non directement par les citoyens mais par ses pairs. Qui fait contrepoids à "l'exécutif", non en théorie mais en pratique ? Quels pouvoirs réels ont "le législatif" et "le judiciaire" ? Qui fait les lois ? Qui les met en œuvre ? Qui fait régner le droit ? Qui décide vraiment ?

Une sorte de confusion des pouvoirs, doublée d'une confusion dans les esprits, pourrait-elle mener à la confusion politique, c'est-à-dire au trouble, au désordre, à la désorganisation voire à une révolution ? Nous n'en sommes sans doute pas là, mais il apparaît vital pour notre République de revenir à la lettre et à l'esprit de ce qu'est une démocratie, et d'engager la restauration du peuple souverain.