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24/01/2014

Le déclin avant la chute ?

«Une civilisation qui ne croit plus en elle-même, qui n'est plus capable de défendre ses valeurs, qui remplace la foi par l'idolâtrie est condamnée tôt ou tard à quitter la scène du monde» avançait en 2005 Le Figaro magazine au sujet de ce déclin annoncé. Un peu plus de dix ans que régulièrement le débat se porte sur notre prétendue décadence. Mais que disent les historiens sur les décadences passées et leurs traits communs ?

Certains défendent par exemple l'idée de la crise spirituelle pour expliquer la mort de civilisations anciennes. «(...) Quand elles ont cessé de comprendre leurs raisons d'être (...)», quand «(...) il n'y a plus (...) de principe fondateur d'une communauté de destin», quand «partout prédomine l'indifférence au bien commun», alors une société, une civilisation se délite. Il convient d'ajouter pour Rome, l'institution d'un système de castes.

Un film de 1986, réservé à un public averti, Le déclin de l'empire américain, donne un éclairage particulier. Son réalisateur Denys Arcand développe la thèse que la recherche du bonheur personnel nuit au rayonnement d'une nation, d'une civilisation, et qu'une société en développement se préoccupe davantage du bien collectif ou d'un bonheur hypothétique futur plutôt que de satisfactions individuelles immédiates.

Pour lui, «les signes du déclin de l'empire sont partout : la population qui méprise ses propres institutions, la baisse du taux de natalité, le refus des hommes de servir dans l'armée, la dette nationale devenue incontrôlable, la diminution constante des heures de travail, l'envahissement des fonctionnaires, la dégénérescence des élites». Toutes observations, discutables d'ailleurs, qui pourraient être généralisées à l'Occident.

En fait, dit-il, «Avec l'écroulement du rêve marxiste-léniniste, on ne peut plus citer aucun modèle de société dont on pourrait dire : voilà comment nous aimerions vivre. Comme sur le plan privé, à moins d'être un mystique ou un saint, il est presque impossible de modeler sa vie sur aucun exemple autour de nous, ce que nous vivons, c'est un processus général d'effritement de toute l'existence», sans repères et sans points d'appui.

Manquant de références et manquant de soutiens, de moyens d'action, de leviers, de ressort(s), l'homme ne se repère plus et se perd dans l'action par calcul, l'action improductive ou l'inaction. Plus soutenu, l'homme devient instable. Sa force morale déclinante, il défaille, fléchit, flanche. La contagion gagnant de proche en proche, assisterait-on à une désagrégation, une "destruction des principes de cohésion" de toute la société ?

 

15/02/2013

Au pied du mur ou dans le mur ?

Nous ne pouvons pas dire que nous n'avons pas été avertis. De partout nous sont arrivés des propos alarmants. Il y a seize ans déjà, Françoise Giroud déclarait au Monde : «C'est la période la plus noire que j'ai connue, à cause de cette désespérance. Certes, j'ai vécu la guerre, les années noires de 1940-1945. Mais on espérait, on se battait. Aujourd'hui les gens se sentent impuissants, et, probablement, ils le sont».

«Plus personne ne contrôle plus rien, confiait en 2003 au Point le ministre-philosophe Luc Ferry. On est dépossédé. La marge de manœuvre et d'efficacité est étroite (...).» Et il s'interrogeait : «Est-ce qu'on est là pour décorer ? Est-ce que la politique existe ou bien disparaît-elle au profit de l'économie mondialisée et de la communication ?». Il se disait pourtant «confiant quant aux chances de limiter le contrecoup social de la mondialisation».

Limiter la casse, voilà à quoi était réduit le gouvernement. François Fillon, ministre alors des affaires sociales..., ne disait pas autre chose à un «Grand Jury RTL-"Le Monde"-LCI» : «(…) On va être placés devant des situations très difficiles en matière d'emploi dans les années qui viennent parce que l'élargissement de l'Union européenne, la montée en puissance de nouveaux pays industriels vont provoquer des délocalisations en cascade».

Mais, ajoutait-il, «nous devons éviter que le rythme de ces délocalisations soit incompatible avec la capacité de réaction de l'économie française». Comment ? Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en parlait aux 4 Vérités sur France 2 : «On a un pouvoir de créer, disons, les conditions pour que les acteurs économiques aient envie d'entreprendre et (...) créent les conditions de cette croissance».

Quel pouvoir !? La croissance n'était pas au rendez-vous, le déficit budgétaire et la dette se creusaient. Et Jacques Attali dans L'Express annonçait avant fin 2003 un plan de rigueur, «ce qui ramènera notre puissance et notre rayonnement à sa triste mesure. Il s'ensuivra une accélération de l'augmentation du chômage : les plans de licenciement d'aujourd'hui ne sont rien à côté de ceux qui se préparent». Nous étions au pied du mur.

Au stade où, comme le soulignait Patrick Devedjan, ministre délégué aux libertés locales, «L'important, c'est de maintenir la cohésion sociale». Françoise Giroud s'exprimait encore ainsi : «On a envie de dire : arrêtons-nous cinq minutes, réfléchissons. Mais est-ce que les gens ont encore la faculté de réfléchir ? (...) Je ne crois pas au progrès moral, mais je crois au progrès social, et nous sommes en pleine régression».