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14/03/2018

Les droits et les devoirs de l'homme

En ces temps troublés, il est bon de relire la Déclaration universelle des droits de l'homme, proclamée par les Nations Unies le 10 décembre 1948. Il y est affirmé entre autres le droit : à la vie, à la liberté, à la sûreté, à la justice, à la propriété, à la liberté d'opinion et d'expression, à prendre part à la direction des affaires publiques, au travail, à un niveau de vie suffisant, à l'éducation, à la culture...

Il paraît évident que des progrès restent à accomplir, y compris dans les "démocraties". Peut-être ces progrès pourraient-ils venir de l'acceptation par chacun d'entre nous de la Déclaration des devoirs de l'homme qui accompagnait celle des droits de l'homme et du citoyen en préambule de la Constitution de l'an III adoptée par la Convention thermidorienne (août 1795). Il y a plus de 220 ans.

Article premier. - La déclaration des droits contient les obligations des législateurs ; le maintien de la société demande que ceux qui la composent connaissent et remplissent également leurs devoirs.

Article 2. - Tous les devoirs de l'homme et du citoyen dérivent de ces deux principes, gravés par la nature dans tous les cœurs : «Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fît. Faites constamment aux autres le bien que vous voudriez en recevoir».

Article 3. - Les obligations de chacun envers la société consistent à la défendre, à la servir, à vivre soumis aux lois et à respecter ceux qui en sont les organes.

Article 4. - Nul n'est bon citoyen s'il n'est bon fils, bon père, bon frère, bon ami, bon époux.

Article 5. - Nul n'est homme de bien s'il n'est franchement et religieusement observateur des lois.

Article 6. - Celui qui viole ouvertement les lois se déclare en état de guerre contre la société.

Article 7. - Celui qui, sans enfreindre ouvertement les lois, les élude par ruse ou par adresse, blesse les intérêts de tous, se rend indigne de leur bienveillance et de leur estime.

Article 8. - C'est sur le maintien des propriétés que reposent la culture des terres, toutes les productions, tout moyen de travail et tout l'ordre social.

Article 9. - Tout citoyen doit ses services à la patrie et au maintien de la liberté, de l'égalité et de la propriété toutes les fois que la loi l'appelle à les défendre.

 

A lire cette Déclaration aujourd'hui, l'on comprend bien pourquoi l'on n'en parle plus depuis longtemps. Presque chacun des principes énoncés a  été remis en cause au fil du temps, et par les législateurs eux-mêmes. Et l'on en vient à se dire que ce n'est peut-être qu'en se rappelant ces devoirs et en rappelant beaucoup d'entre nous à leurs devoirs que nous pourrons de nouveau faire société.

14/02/2018

Irresponsable et coupable

Depuis le désormais célèbre «responsable mais pas coupable», on s'interroge sur la notion de responsabilité. Beaucoup avancent qu'elle est une contrepartie de la liberté. La responsabilité peut donc être vécue comme une dépendance, une contrainte, et la liberté s'en trouve restreinte au droit de faire tout ce qui n'est pas défendu par la loi.

Seulement, qui connaît cette loi que nul n'est censé ignorer ? Les dirigeants s'entourent de toutes les précautions pour éviter de subir les conséquences de leurs décisions. Et c'est la définition même de responsabilité qui est mise en cause. «D'obligation ou de nécessité morale, intellectuelle de réparer une faute, de remplir un devoir, un engagement», la responsabilité devient un risque à écarter.

Il ne s'agit donc plus d'assumer mais de se couvrir. D'accord pour prendre une responsabilité mais à condition de ne pas avoir à endosser la responsabilité, de ne pas être tenu pour responsable, au cas où... C'est ainsi que la responsabilité se fait de plus en plus collective et se dilue dans toute une chaîne de responsabilités. C'est ainsi que l'assurance envahit toute la société.

Ce dernier phénomène est tout à fait symptomatique d'une "déresponsabilisation" individuelle. Le responsable, en fait bien souvent dépassé par sa charge du fait d'une complexité croissante dans tous les domaines, préfère se décharger, se libérer, décliner toute responsabilité. Et l'excès de prudence, l'obsession de se prémunir favorisent l'immobilisme.

Mais rendre compte et répondre de ses actes - cette si insupportable transparence - n'est pas forcément non plus dans les habitudes des responsables, plus enclins à demander des comptes qu'à en devoir. Et le réflexe serait plutôt de rejeter la responsabilité sur les autres, de rendre quelqu'un d'autre responsable, plutôt que d'en être solidaire.

Etre responsable c'est être conscient d'être l'auteur incontestable d'un événement ou d'un objet, écrivait en substance Sartre. Etre responsable consisterait donc à reconnaître s'il y a lieu sa culpabilité. Aveu d'autant plus difficile à faire que l'on a agi de façon déraisonnable, irréfléchie ou inconséquente, c'est-à-dire de façon irresponsable. Irresponsable et coupable.

27/02/2017

Vivons-nous la vie que nous voulions vivre ?

Que sommes-nous devenus ? C'est la question que nous devrions nous poser eu égard aux promesses de notre jeunesse, en souvenir d'elles. Qu'espérions-nous alors ? devenir riche et célèbre ou du moins devenir quelqu'un ? c'est-à-dire "un homme ou une femme de valeur, ayant une forte personnalité", et non "une personne indéterminée". Ou peut-être devenir quelqu'un de bien plutôt que devenir quelqu'un d'important ? Ou les deux ?

Espérions-nous aimer et être aimé, fonder un foyer ? Espérions-nous dans le progrès, l'amélioration de la vie, de notre situation, des conditions de travail, de notre santé, de notre sort… ? Quelle carrière comptions-nous suivre ? De quel destin rêvions-nous ? Quel sens souhaitions-nous donner à notre existence ? Qu'attendions-nous de la vie ? Et que sont devenues nos bonnes résolutions ? Qu'avons-nous fait de nos talents ?

Avons-nous fait fructifier nos dons ? Ou végétons-nous, ne nourrissant plus aucun espoir ? menant une existence à la petite semaine, entre "Ne prendre aucun risque" et "Ne rien faire" ou "En faire le moins possible" ou "Faire ce qu’on a toujours fait", revenant à rester inerte, sans réaction. Où est-elle la belle énergie intellectuelle ou morale de nos vingt ans ? Est-ce que l'«0n est sans feu ni lieu. Sans foi ni loi. On passe» selon les mots de Sartre ?

Croyons-nous vraiment encore à ce que nous faisons et mettons-nous du cœur à l'ouvrage ? "A cœur vaillant rien d'impossible". A cœur défaillant rien de possible. Vivons-nous dans une société d'acteurs désabusés, comme le pense Eric Dupin, journaliste, essayiste et enseignant à l'Institut d'études politiques de Paris, dans son livre Une société de chiens au Seuil ? N'y en a-t-il que pour les petits calculs et les grands intérêts ?

Sommes-nous encore capables de débattre avec passion, de discuter âprement, de nous disputer, de parler d'autre chose que de généralités ? Ou André Gide avait-il raison qu'«On ne s'entend que sur les lieux communs. Sans terrain banal, la société n'est plus possible» ? Sommes-nous condamnés au bavardage, à devoir donner des gages pour nous intégrer ? Sommes-nous réduits à parler pour ne rien dire, à ne pouvoir causer qu'à bâtons rompus ?

Que d'espoirs déçus ! «L'idéal moderne de liberté, l'affranchissement de la tradition pour mener sa vie propre, authentique, pour être soi-même - comment cela a-t-il pu déchoir en liberté de choisir le lieu de ses prochaines vacances ? La vie ressemble à une simple mise bout à bout d’émotions, sans autre sens que l’angoisse d’un arrêt. (...) Comment en sommes-nous arrivés à cette monstrueuse insignifiance ? Comment avons-nous pu à ce point nous fourvoyer ?»

* Olivier Rey dans Itinéraire de l'égarement au Seuil