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07/01/2022

L'amour, remède à la solitude

«Un Homme seul est toujours en mauvaise compagnie» écrivait Valéry. La solitude est sans doute la plaie d'une société dite de communication où l'on confond les moyens et la fin c'est-à-dire établir une véritable relation, et où tandis que l'un dialogue sur internet avec un interlocuteur du bout du monde, l'autre, son voisin, son conjoint peut-être, dîne devant la télévision.

Certains vantent la vie de célibataire, l'indépendance, la liberté, mais la plupart passent leur vie à chercher l'âme sœur qui se dérobe. De déceptions en échecs, la vie commune semble être devenue un défi quasi insurmontable. Et l'on ne compte plus les bons apôtres qui vous expliquent que vivre toute sa vie avec la même personne relève de l'utopie.

Et pourtant, une écrasante majorité de nos concitoyens et de jeunes en particulier, rêvent de vivre pour toujours avec une seule et même personne. Et pourtant si un peu plus de quatre mariages sur dix finissent en divorce, cela veut dire que près de six sur dix s'achèvent avec la disparition de l'autre. Et pourtant beaucoup de couples demeurent fidèles à leur engagement pris devant le maire, le curé ou juste les yeux dans les yeux.

Si le libéralisme économique a ses victimes (chômeurs, exclus, nouveaux pauvres), le libéralisme des mœurs, parfois conjugué au premier, a les siennes : ces personnes délaissées par leur conjoint ou élevant seules leurs enfants, ces personnes mûres abandonnées pour des plus jeunes, ces personnes âgées isolées qui n'attendent plus rien de la vie.

Et puis il y a ces personnes solitaires en quête parfois toute leur vie d'une épaule accueillante, d'une oreille attentive, d'un regard pénétrant, d'une bouche amoureuse, de bras chaleureux et de mains caressantes. Toutes les théories sur les joies du célibat ne les atteignent pas, même si avec le temps elles finissent par se persuader qu'elles ne sont pas si malheureuses.

Malgré les nouveaux modèles et les ersatz de bonheur qu'on essaie de leur imposer, ces personnes sentent au fond d'elles-mêmes que rien de plus beau n'a été inventé par l'Homme que ces quelques mots prononcés en se tenant la main : «je jure de t'aimer fidèlement, de te protéger et de te soutenir tout au long de notre vie», promesse d'une relation dont on ne pourra donc juger de la qualité que dans et par la durée.

09/02/2018

Cause toujours !

Soumis sans répit à une avalanche de nouvelles, annonces, déclarations, publications, rumeurs..., nous encaissons les coups. Comme des éponges, nous absorbons sans même nous en rendre compte les messages dont nous sommes les destinataires, que nous "régurgitons" à la demande sous forme d'opinions, de comportements, d'achats... Mais avons-nous notre mot à dire ?

Le mot "Formation" définit à la fois les moyens mis en œuvre pour éduquer intellectuellement et moralement un être humain, et les résultats obtenus. Il n'y a que dans des sociétés très avancées qu'il est possible de multiplier les moyens sans obtenir de résultats. Il est même envisageable de suivre une formation et d'en sortir déformé. Qui a dit que notre temps manquait de mystères ?

Le mot "Déformation" nous renvoie donc à la déficience éducative et culturelle d'un enseignement. Même si celui-ci conduit à une certaine instruction, une accumulation de connaissances qui induisent des savoir-faire, qu'en est-il du "savoir-être" et du savoir-vivre ? C'est quand il y a altération du jugement, du goût, du langage..., de la vérité..., que le mot "Déformation" prend toute sa signification.

Le mot "Information" est exigeant. Il faut entendre par là un renseignement, un fait que l'on porte à la connaissance du public. Une information est censée être exacte, claire, utile... Mais faute de formation, de courage, de temps ou de moyens... De plus, trop d'informations tuent l'information. Et puis l'information flirte souvent avec la communication, donc le commentaire, la publicité et la propagande.

Le mot "Désinformation" paraît alors plus approprié. Le Petit Robert la définit comme I'«utilisation des techniques de l'information (...), pour induire en erreur, cacher ou travestir les faits». Le Petit Larousse précise que cela consiste à «diffuser sciemment une ou plusieurs fausses informations donnant une image déformée ou mensongère de la réalité (...)». Nous voilà revenus à la déformation.

Notre société de communication serait ainsi composée de multiples "émetteurs" inondant de fausses informations - partielles et partiales (les vraies noyées dans la masse) - des "récepteurs" insuffisamment formés ou déformés, dont l'avis compte peu. Une boutade demande la différence entre la dictature et la démocratie. Réponse : la dictature, c'est «Ferme-la !» ; la démocratie : «Cause toujours !».

 

28/02/2014

Un homme qui n'est plus "habité"

Nous évoquions tantôt David Riesman, l'auteur du livre dont le titre complet est La Foule solitaire, anatomie de la société moderne. Philippe Breton, alors sociologue, chercheur au CNRS et enseignant à la Sorbonne, y faisait référence dans son ouvrage La Parole manipulée paru aux éditions La Découverte en 1997. Il y relevait que le sociologue américain avait vu dès les années cinquante l'apparition d'un "homme d'une espèce nouvelle".

«(...) Il oppose l'individu traditionnel, "intra-déterminé", à l'homme moderne "extro-déterminé". Celui-ci ne dispose plus, pour reprendre les métaphores de Riesman, d'un "gyroscope intérieur", réglé par sa famille et son groupe social, et qui lui sert de guide de comportement défini a priori, mais plutôt d'un "radar" qui lui permet de traiter l'information reçue de l'extérieur et de s'y adapter d'une façon assez conformiste.

«L'individu extro-déterminé a un comportement presque entièrement influencé par l'extérieur, ce que pensent les autres, le jugement des "gens qui comptent". C'est un être entièrement social, réagissant aux réactions d'autrui, qui est loin de considérer comme une entrave à sa liberté toutes les incitations qu'il reçoit du monde environnant. Au contraire, il a tendance à considérer celles-ci avec soulagement (...).»

Car ainsi "au courant", l'individu peut s'orienter et agir en conséquence. "Un homme averti en vaut deux." "Branché", "Câblé", il reste en phase avec son temps. "A la page", il adopte "la marche à suivre" afin d'obtenir ce qu'il veut ; et toujours "regarde de quel côté souffle le vent" pour rester "dans le vent". De ce fait, Philippe Breton décrit «l'homme moderne de la société de communication, comme un "être sans intérieur" (...)».

Ouvert aux quatre vents, il n'a plus d'ancrage. Il flotte au gré des flots, tourne à tous les vents ou prend le chemin signalé par des phares et balises, sa boussole interne déréglée. Hors service la coutume ("habitude collective d'agir, transmise de génération en génération") et la morale ("ensemble des règles de conduite considérées comme bonnes de façon absolue") qui avaient l'inconvénient de s'opposer au changement.

La coutume a été remplacée par l'attrait pour la nouveauté qui permet la consommation. Les usages se sont inclinés devant l'utilité et l'efficacité. Il n'y a plus de morale, il n'y a que des circonstances auxquelles il faut s'adapter et dont il faut profiter. Les "Tout ce qui peut être fait, doit être fait" ont succédé aux "Cela ne se fait pas". Et comme le caméléon se fond dans son milieu, l'individu se fond dans la foule, et disparaît.