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06/02/2025

Les Américains, premiers servis

L'évêque épiscopalienne de Washington (religion anglicane), donc non catholique, a appelé à la miséricorde, soit : la pitié, la sensibilité face au malheur d'autrui, ici les migrants et les personnes LGBT. C'est « extrêmement courageux » de le faire durant un office où il n'est évidemment pas possible de répliquer ; question de respect. Interpeller (sans en avoir rien à craindre) le président des États-Unis est une chose, une autre chose est de savoir en quoi les mesures qui visent à restreindre le nombre des immigrés illégaux et à ne pas troubler trop précocement les mineurs avec des questions d'orientation ou d'identité sexuelle, sont mauvaises en soi. La miséricorde de Dieu est pour tous et, en premier, pour les pauvres et les malheureux, qui ne se trouvent pas seulement dans les rangs des migrants et des LGBT.

Il se trouve que Donald Trump considère qu’il est de sa responsabilité première de s’en prendre à la pauvreté et au malheur de ses propres concitoyens, et que les questions d’orientation ou d’identité sexuelle sont secondaires, quand elles ne lui paraissent pas pernicieuses. La démocratie, c’est d’abord la prise en considération de l’intérêt, de la volonté de la majorité des citoyens. En axant notamment les politique sociales sur les minorités (agissantes), qui plus est pour une part étrangères et entrées illégalement sur le territoire américain, et parfois criminelles, la pauvreté et le malheur se sont trouvés comme réorientés ou reconcentrés vers les classes sociales américaines défavorisées, modestes voire moyennes. L’idée du Républicain est simple : ce sont les citoyens d’un pays qui devraient être les premiers servis par les services publics de ce pays.

Donald Trump est excessif, vulgaire et malhonnête, mais il parle au peuple de ses problèmes, de sa pauvreté, de son malheur, et notamment à ce peuple de petites gens qui n’ont pas la vie facile et qui se sentent comme étrangers dans leur propre pays. Curieux que cela ne semble pas résonner dans le cœur d’une évêque. Curieux que cela semble inaudible. Curieux que les pauvres malheureux ne puissent se concevoir que chez des minorités étrangères ou sexuelles. Qu’on les surnomme rednecks ou hillbillies voire white trash, ils n’ont de sûres que leur identité et leur citoyenneté, qui, à leurs yeux, ne les avantagent plus. Plus de différences pour eux entre "réguliers" et "irréguliers". Alors, malgré ses outrances et ses abus, ils se tournent vers celui qui leur parle de l’Amérique des pionniers, durs à la tâche et risque-tout. Question de dignité.

16/12/2024

Noël, nouvel an et l'esprit sain

"Joyeux Noël et bonne année" disons-nous un peu mécaniquement ces jours-ci. Revoilà ces fêtes de fin d'année avec leur cortège de gueuletons et d'enthousiasmes légèrement factices. Une fête en larmes*, c'est le beau titre d'un livre de Jean d'Ormesson qui voyait ainsi la vie. Mais pour beaucoup de nos contemporains, il y a plus de larmes que de fête et, dans nos sociétés, de plus en plus de fêtes pour mieux cacher les larmes.

«Je n'ai rien à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur» disait Winston Churchill le 13 mai 1940 devant la Chambre des communes. La guerre économique qui fait rage, n'offre rien de bien différent, surtout pour les hommes de troupe, la piétaille qu'on piétine. Et Flaubert a sans doute raison quand il écrit qu'«Etre bête, égoïste, et avoir une bonne santé, voilà les trois conditions voulues pour être heureux».

Bêtes et disciplinés, nous allons au top départ faire la fête, nous en mettre plein la lampe, nous souhaiter une bonne santé et nous soucier de la terre entière comme d'une guigne. Avec les "andouilles" et les "truffes", les "dindes" de Noël "glouglouteront" et les "oies" gavées "criailleront" alors que des millions esseulés, délaissés, des milliards ne sont pas à la fête dans le monde et n'ont dans leur "vallée de larmes", leur vie terrestre, même pas l'espoir d'une autre vie.

«Tant que tu seras heureux, tu compteras beaucoup d'amis. Si le ciel se couvre de nuages, tu seras seul» (Donec eris felix, multos numerabis amicos. Tempora si fuerint nubila, solus eris). Ovide, exilé et abandonné, dit sa détresse dans ces vers tirés de son recueil Tristes, et décrit par là même celle de ceux qui dans leur propre pays sont comme exilés et abandonnés à leur triste sort. «Malheur à l'homme seul !» (Vae soli ! - l'Ecclésiaste).

Comment avoir goût à la fête ? Ovide disait aussi dans un aphorisme de L'Art d'aimer : «On ne désire pas ce qu'on ne connaît pas» (Ignoti nulla cupido), à savoir traduit Le Petit Larousse : "L'indifférence naît de causes diverses, le plus souvent de l'ignorance". Et Victor Hugo dans L'Homme qui rit interpellait la Chambre des lords et tous les contents d'eux : «Si vous saviez ce qui se passe, aucun de vous n'oserait être heureux».

Mais combien préfèrent ne pas savoir "ce qui se passe", ou le savent et feignent de l'ignorer, ou encore le sortent de leur esprit pour ne pas gâcher la fête ! Pourtant la santé de l'esprit passe par là, tout aussi souhaitable que la santé du corps. «Une âme saine dans un corps sain» (Mens sana in corpore sano), voilà tout ce que l'homme vraiment sage demande au ciel, selon une maxime de Juvénal dans Satires. "Bonne santé."

* Éditions Robert Laffont

08/11/2024

Trump l’incorrect préféré à Harris "politiquement correcte"

Le mot "fascisme" est lié à celui de "totalitarisme", soit, nous dit Le Petit Robert : un « régime à parti unique, n’admettant aucune opposition organisée, dans lequel le pouvoir politique dirige souverainement et tend à confisquer la totalité des activités de la société qu’il domine ». Il faut donc raison garder : l’hégémonie d’un parti ou d’un pouvoir politique n’est pas pour demain aux États-Unis où triomphent le libéralisme et l’individualisme. Et puis l’opposition semble parfaitement organisée contre Donald Trump. Mais cela n’a pas suffi. Une majorité d’Américains, pourtant très au fait des multiples abus et délits dont il s’est rendu coupable, l’ont préféré à Kamala Harris. Peut-être tout simplement l’ont-ils considérée comme plus dangereuse ?

Peut-on émettre l’hypothèse comme l’historien Jacques Bainville que « (…) l’anarchie engendre des Césars » ? « L’attachement populaire à l’"ordre" », souligné par Jacques Marseille dans son livre Du bon usage de la guerre civile en France aux éditions Perrin, est trop souvent négligé par les politologues. « (…) La chienlit, non » pourrait dire le peuple en paraphrasant le général de Gaulle. Et Kamala Harris et les Démocrates ont peut-être été jugés coupables de saper les fondements de la démocratie américaine, notamment avec leur "progressisme" abusif qui a pu conduire à semer la division, la désunion. « C’est la dose qui fait le poison. » Et c’est pareil pour la libéralisation économique, la précarité dans l’existence ou les flux migratoires.

Un "César" a donc été élu démocratiquement, comme il y a huit ans. Il a le visage rassurant de celui qui l’a déjà été. Il a le visage déterminé de celui qui va à contre-courant. Il a le visage inquiétant de celui qui semble capable de tout. Mais comme dans toute démocratie libérale, son pouvoir est limité. Les mêmes (institutions politiques et contre-pouvoirs) qui ont tout fait pour qu’il ne soit pas élu, le modéreront en évitant, il faut l’espérer, de tout faire pour qu’il échoue. Et peut-être les Démocrates s’interrogeront-ils sur ce que veut la majorité au lieu d’être obnubilés par les minorités ou pire, de tenter de rééduquer cette majorité (comme dans tout bon régime fasciste). Revenir au principe de la démocratie représentative qu’est la majorité, ne peut pas vraiment faire de tort, si tant est qu’on soit démocrate.